Moi, je parle beaucoup. Mais je ne dis rien

Sans doute qu’on parle mieux des autres que de soi, qu’on voit mieux la beauté de celui que l’on aime que celle que l’on porte en soi. Sans doute. Sans doute qu’aimer rend étrange, incapable de voir le réel et, pourtant, dans le même temps, d’une lucidité terrifiante …

Ce garçon, ce garçon-là, il était tout ce que j’aimais. Et souvent, on ne sait ce que l’on aime que parce qu’on vient de le rencontrer. Avant cela, on ne savait pas. Sans cela, on ne saurait pas. 

Moi, je parle beaucoup. Mais je ne dis rien. Ce qui est important, profond, essentiel à ma vie, je n’en parle jamais. L’homme que j’aime, c’est mon secret. Que ce secret soit ancien ou tout récent, c’est un autre secret. Parce que les artistes, j’ai lu ça, balancent entre le besoin de communiquer et celui de se cacher. 

Ce mec était beau. Et il m’a attirée en un mouvement de peau. L’attirance, chez moi, c’est immédiat. Sinon, elle ne sera pas. 

Ce mec était beau. Tout en lui l’était. L’extérieur et l’intérieur. Sa beauté était sauvage, presque lointaine. Inépuisable fontaine. Tout y était pur, fragile, vierge, innocent. Tout y était immaculé. 

J’ai découvert que c’est ce que je préférais. La pureté. La liberté de ceux qui n’ont pas peur de ne pas se salir. La liberté. Celle de rester soi envers et contre tous les choix. 

La pureté et la liberté. Elles se rejoignent, comme deux mains qui s’aiment, deux lèvres. 

Ce mec-là, je n’en parle pas. A personne. Il n’y a que les mots écrits qui peuvent parler de lui. Ces mots-là ne sont pas comme les autres, comme lui. Ils ne font pas de bruit. 

Mon amour pour lui est comme la mer. Un immense bruit silencieux et infini.  

©️Martine Benz

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