Mais l’Alsace, c’est quoi ?

DEUXIEME PARTIE

Pierre Klein

Les continuités

L’Alsace a une forte identité rhénane et c’est une grande chance pour la France d’avoir un pays rhénan en son sein. Elle a tout intérêt à lui conserver sa rhénanité. Elle est rhénane, parce qu’elle a participé de ce qui a été le principal axe de civilisation dans l’Europe du Moyen Âge et de la Renaissance. Lorsque l’on fait dire à Louis XIV voyant pour la première fois l’Alsace – quel beau jardin- cela confirme la beauté et la richesse économique et culturelle de la région. Un siècle plus tôt, Érasme de Rotterdam a pu dire de Strasbourg « J’ai vu une monarchie sans tyrannie, une aristocratie sans faction, une démocratie sans désordre, la richesse sans luxe, la prospérité sans outrecuidance. Saurait-on imaginer bonheur plus réel que cette harmonie ? ». Encore de nos jours, l’Alsace participe à l’épine dorsale économique, un axe qui va de Londres à Milan en passant par la vallée du Rhin, avec ce que cela représente toujours de possibilités économiques et culturelles pour elle.

Une troisième identité est linguistique

La langue n’est pas toute l’identité. Ainsi ne peut-on pas définir l’identité française par la seule langue française. La langue confère une identité linguistique. S’agissant de l’Alsace, en raison de la présence, pas seulement historique, de deux langues, la française et l’allemande (standard et dialectale), l’identité linguistique de l’Alsace est bilingue. Derrière les langues d’Alsace, il y a la culture. Aussi, ces langues contribuent-elles à l’identité culturelle, en l’occurrence à une culture bilingue ou encore à une double culture. La culture est à la base de tout, et lorsqu’elle est double, elle en dédouble les impacts. En marge de cela, posons-nous la question (iconoclaste ?) de savoir l’Alsace et ses paysages culturels seraient les mêmes si on n’y avait pas en particulier parlé et écrit l’allemand. Pour s’en convaincre, comparons-les avec ceux de deux régions voisines, le Pays de Bade et le département des Vosges. 

Une quatrième identité de l’Alsace est culturelle. 

La culture est à la base de l’unité de l’Alsace, en même temps que son originalité la plus tangible. Elle se caractérise essentiellement par son intensité, sa profondeur et sa pluralité. Cette dernière trouve ses origines dans les apports successifs (français, allemands, proprement alsaciens et autres) qui, aujourd’hui, se confondent de bien des façons pour former la culture alsacienne. Aussi, l’Alsace peut-elle être décrite comme une terre d’échange et de synthèse. 

Les choses cependant, n’ont pas été et ne sont pas toujours simples. Les ruptures et les affrontements politiques et nationalistes, l’érosion actuelle de pans entiers de la culture alsacienne et la perte de repères qui l’accompagnent ne sont pas sans créer des interrogations, des doutes et des malaises. 

Une cinquième identité de l’Alsace est économique

Si l’Alsace a (encore) une forte identité linguistique et culturelle, elle a aussi une forte identité économique. Et les deux sont en forte interrelation et s’enrichissent (encore) réciproquement. L’Alsace est fille de l’histoire, mais l’histoire a longtemps fait de l’Alsace un glacis politique et économique. Aujourd’hui, et c’est un peu comme une réparation historique, comme une émancipation active des pesanteurs de l’histoire, en tout cas c’est une nécessité vitale, la géographie impose à l’Alsace et à son économie une logique et une dynamique d’ouverture internationale avec une priorité pour le bassin du Rhin. L’intégration européenne a donné un grand souffle à l’Alsace et à son économie.

PK

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