Michel Naudo, l’ancien président de la « Commission gouvernance » du Conseil économique et social d’Alsace, qui a été à l’initiative du référendum sur la fusion de la Région Alsace et des Départements du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, ne veut pas en rester là.
Il vient d’envoyer à la presse et aux institutions une proposition pour aller encore plus loin : le droit de pétition.
Après plusieurs recherches, il souhaite relancer ce droit qui existe depuis la révolution française et qui vient d’être remis à jour par l’Assemblée Nationale. Sa mise en œuvre pourrait être selon lui, « immédiate ».
L’auteur du livre « L’Alsace Malgré Elle » qui explique dans son pamphlet les raisons de l’échec du référendum de 2013 ne veut pas « reproduire les erreurs du passé ».
Pour lui, les alsaciens attendent maintenant du concret. Il faut donc un outil pour promouvoir l’Alsace en revoyant la problématique de la décentralisation.
L’idée est de donner une suite à la démarche de la consultation citoyenne pour imposer un vrai débat au Parlement car « le départ de l’Alsace du Grand Est ne peut passer que par la loi, article 72 de la Constitution ».
Il conclut « dans une nécessité absolue pour l’Alsace d’une collectivité territoriale à statut particulier », exactement comme le préconise le parti alsacien Unser Land, « mais sans les poncifs liés au séparatisme ou à l’autonomie qui sont rejetés par la population ».
Nous publions ci-dessous sa tribune
Churchill
Pour aller plus loin : Michel Naudo, auteur du livre L’Alsace malgré elle paru aux Éditions de la Nuée bleue (mai 2021)
« Le président Bierry a organisé du 21 décembre 2021 au 15 février dernier une consultation citoyenne demandant aux Alsaciens de répondre par oui ou par non à la question suivante : « L’Alsace doit-elle sortir du Grand-Est pour redevenir une Région à part entière ? ». Sur plus de 153.000 bulletins jugés valides, la réponse a été à 92% « oui ».
Afin que cette consultation ne reste pas lettre morte, je propose que sur la base de ces résultats et de cette mobilisation, le président Bierry utilise le droit de pétition qui est très peu connu en France et qui pourtant existe depuis la Révolution française.
Le droit de pétition, un droit méconnu
Ce droit de pétition est défini par l’article 4 de l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires et par les articles 147 à 151 du Règlement de l’Assemblée nationale. C’est un droit qui a vocation à ouvrir les travaux parlementaires à la société civile et a fait récemment l’objet d’une mise à jour avec l’ouverture d’une plateforme des pétitions en ligne sur le site de l’Assemblée nationale qui permet aux citoyens de déposer ou de signer des pétitions.
https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/petitions
Si une pétition atteint plus de 100.000 signatures, elle est mise en ligne sur le site de l’Assemblée pour lui donner plus de visibilité. Si elle recueille plus d’un demi-million de signatures sur au moins 30 départements, elle pourra faire l’objet d’un débat en séance publique.
La plupart de ces pétitions sont classées sans suite du fait de la faible mobilisation qu’elles suscitent. Il faut en effet leur assurer une large publicité pour atteindre le premier seuil des 100.000, ce qui est quasiment impossible si l’initiateur est un citoyen de base.
Si le président Bierry se lançait dans cette initiative, les chances d’aboutir seraient certaines compte tenu de la forte mobilisation qu’ont suscité tous les acteurs de la consultation citoyenne en obtenant plus de 153.000 votes.
Ainsi le premier seuil serait, en principe, facilement atteignable sur la seule base des signatures alsaciennes, permettant ainsi à la pétition d’apparaître sur le site du Parlement. Pour arriver au seuil suivant des 500.000 signatures réparties sur 30 départements, il est quasi certain qu’un sujet exclusivement alsacien ne sera pas en mesure de l’atteindre.
Remettre l’ensemble de la réforme territoriale sur l’ouvrage
C’est pourquoi le sujet de la pétition et la question posée doivent dépasser le cadre alsacien tout en y faisant référence et englober le redécoupage des grandes Régions en se plaçant dans l’objectif d’une vraie réforme territoriale.
En cela, le dernier sondage Ifop publié le 25 mai dernier à Metz est un indicateur précieux car on y apprend que 46% des Lorrains et Champardennais seraient favorables à une dissolution du Grand Est.
La presse locale, notamment le quotidien rémois l’Union ainsi que l’hebdomadaire lorrain la Semaine, s’est faite l’écho de ce désamour pour la méga-région Grand Est. Sur cette base, il n’est pas irréaliste de penser que la mobilisation d’un demi-million de citoyens sur trente départements serait facilement atteignable car la mauvaise presse qui caractérise la création des grandes Régions semble toucher tous les territoires du pays.
Le législateur est le seul qui a la main quand il s’agit de redéfinir le périmètre des collectivités territoriales, s’agissant de leur territoire ou de leurs compétences. Ainsi, les Alsaciens seraient à l’initiative d’un débat public à l’Assemblée nationale sur le thème de la réforme territoriale en utilisant leur propre vécu en Alsace depuis l’échec du référendum de 2013, en passant par la création des Grandes Régions puis l’avènement de la Collectivité européenne d’Alsace.
Dans ce cas de figure, il sera très intéressant d’observer l’accueil réservé à cette idée par les différents candidats aux prochaines élections législatives qui ont la défense de l’Alsace comme étendard. Et plus tard, de lire les prises de positions officielles de nos députés alsaciens une fois élus…
Chiche !