Il y a dix ans, la solidarité avait pris la forme d’un slogan : « Je suis Charlie ». Mais les slogans appartiennent à la publicité et la publicité est souvent mensongère.
Ainsi, le temps passa, et tout ce qui était mis à mal ou disparaissait eut droit à son « Je suis » en guise de soutien. Je suis Samuel Paty, je suis prof, je suis le latin, je suis le Maroc, je suis juif, je suis Gaza, je suis Gisèle Pélicot.
Mais les mots ont un sens. On est soi-même et puis c’est tout.
On n’est pas Charlie si on n’est pas capable d’humour et de dixième degré.
On n’est pas Samuel Paty si on dit que ma foi, il est quand même allé un peu loin dans son enseignement.
On n’est pas le latin si on ne défend pas une instruction de qualité et d’exigence pour l’école publique.
On n’est pas le Maroc si on ne s’est pas mobilisé pour faire un don aux sinistrés lors du tremblement de terre.
On n’est pas juif si on n’a pas chaque jour chevillée au cœur la volonté de voir les otages libérés.
On n’est pas Gaza en ruines depuis son petit confort de politicien qui se limite à tweeter ou à insulter les autres.
Et enfin on n’est pas Gisèle Pelicot parce qu’aucune femme n’a subi son calvaire. Aucune.
On est qui on est, et puis c’est tout. Et le monde d’aujourd’hui nous montre que c’est pas bien joli. Il faut en repenser et en repanser les fondations. Se parler. Avoir le courage d’être léger. Ne pas se prendre au sérieux, jamais. Charlie, c’était ça.
Cécile Chabaux