Même loin de Paris, on se frotte les oreilles après avoir entendu le ministre des transports, Patrice Vergriete, conseiller aux Parisiens d“adapter leur comportement”, face aux restrictions de circulation prévues sur les routes et dans les transports en commun pendant les Jeux Olympiques.
Le piéton doit « anticiper et adapter ses déplacements », plus particulièrement pendant les J.O., comme si, à l’instar du piéton dans toutes les villes françaises, il n’était pas déjà un expert de l’esquive, de l’évitement et du sauvetage in-extremis.
Oui, mais le piéton doit comprendre que, pendant les J.O., il lui faudra faire « encore plus ». Pour commencer, cette feignasse pourra profiter des J.O. pour faire du vélo, même s’il est unijambiste, car le ministre en véhicule de fonction avec chauffeur considère que « dans ces grands événements, il faut adapter son comportement. C’est peut-être le moment de ressortir son vélo. Parce qu’il n’y aura pas de restrictions sur le vélo ou la marche. Pendant les JO et les Jeux paralympiques, se déplacer en vélo sera très très libre».
Ma grand-mère de 90 ans piaffe d’impatience ; elle se voit déjà slalomer, chignon au vent, entre les terrasses sur les trottoirs, vendeurs à la sauvette, dealers, trottinettes, touristes, barrières de chantiers, crottes de chiens, immondices, bref, tous ces petits riens qui font le charme de Paris, comme le dit si bien l’adjoint au tourisme de la Capitale, Frédéric Hocquard, qui trouve que les vendeurs à la sauvette, « font quasiment partie du paysage ». Dont acte ; désormais, le racolage agressif, le recel, la contrefaçon, l’ivrognerie sur la voie publique, la mendicité organisée, l’insalubrité et l’insécurité « font partie du paysage » de la Capitale de la France et, par conséquent, du paysage touristique de la France.
On se demande après ça pourquoi les touristes chinois ont troqué le Petit Livre rouge pour un guide les aidant à se prémunir des agressions en tout genre auxquelles ils risquent d’être confrontés en visitant la ville des Lumières.
Les édiles des temps modernes ont décidément du mal avec le réel. Leur lointaine ancêtre spirituelle invitait les pauvres qui n’avaient plus de pain à manger de la brioche. Nos Marie-Antoinettes contemporain(e)s invitent les citadins qui n’ont plus leur place dans le métro à partir en vacances, les vieux à rester chez eux, les pauvres à s’installer à la campagne, les malades à ne pas l’être pour ne surtout pas gâcher la fête des nantis.
La société qu’ils disent « progressiste », multimachinchose et « inclusive », est en réalité et par essence, la plus exclusive.
L’inclusion, c’est faire place nette avant l’apogée de l’Homme nouveau : jeune métis à roulettes, aisé, mobile, malléable, sans attaches, sans histoire(s). L’avenir est au thé matcha et au quinoa.
La société inclusive exclut au nom de la pureté. ça me rappelle quelque chose… j’ai froid… d’effroi.
OT