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La déconfiture de la responsabilité

Florian M., le policier qui a tué Nahel le 27 juin à Nanterre, a été présenté devant le Juge le jeudi 6 juillet pour être maintenu en détention provisoire. Or, il semble évident que cette décision va à l’encontre des droits du fonctionnaire et des principes de la loi, tout en ménageant la responsabilité de l’État en la matière qui, ce faisant, se prémunit de gérer d’autres éventuelles émeutes de quartiers.

Mais voyons les choses objectivement

Dans ce que l’on appelle la responsabilité professionnelle, il y a toujours une notion de garantie sur laquelle l’obligation de compétence doit s’appuyer. Cependant, il y a deux types de garanties, la garantie de résultat et la garantie de moyen.

Si, pour la première sont concernées les entreprises de travaux, par exemple, pour la seconde l’élément de la mise en œuvre des moyens est de principe fondamental. Ainsi, un plombier devra garantir le bon résultat de ses travaux et il aura donc la responsabilité du bon fonctionnement de l’ouvrage qu’il aura réalisé.

De l’autre côté, un médecin ne peut garantir la guérison d’un patient. Néanmoins, il est dans l’obligation d’employer tous les moyens nécessaires qui permettent de soulager le malade et lutter contre la pathologie.

À telle enseigne, les pompiers sont tenus par la garantie de moyens, car ils ne peuvent garantir le résultat de leur intervention sur un sinistre qui ne peut leur être imputable.

De même pour les forces de l’ordre, policiers et gendarmes. Pour ces corps constitués, seule la garantie de moyens pourrait s’accorder à leur responsabilité professionnelle.

Toutefois, lorsque l’on parle de garantie de moyen, il s’agit bien évidemment de tous les moyens mis à la disposition des praticiens de santé ou des intervenants constituant les forces de l’ordre. Ainsi, la formation professionnelle continue doit être le moteur permettant d’assurer cette garantie de moyen.

C’est alors que, si un malade décède à la suite d’une intervention chirurgicale, on ne peut accuser le médecin de n’avoir pas sauvé le patient, sauf s’il n’a pas usé de tous les moyens mis à sa disposition pour assumer ses fonctions.

Voilà pourquoi, au lieu d’incriminer le policier qui a malencontreusement utilisé son arme, portant un coup fatal au jeune délinquant de Nanterre, je préfère pointer mon doigt accusateur à sa hiérarchie qui, au-delà des grades structurant sa corporation ou son institution, implique directement la responsabilité de l’État et son gouvernement au premier chef.

Il est toujours facile de remplacer un fusible, mais il est toujours préférable de réparer la cause principale de la panne ou du désordre.  

Dès lors, dans l’affaire de Nanterre, j’estime que les conclusions hâtives du juge de la cour d’appel de Versailles, incriminant le policier maladroit en le maintenant en détention provisoire, est porteuse d’une lourde responsabilité doublée d’une inconscience désinvolte et désespérante. Mettre en examen un policier et le placer en détention provisoire, c’est mettre au même pied d’égalité l’institution publique gardienne de la paix et le monde justiciable de la délinquance.

De plus, lorsque le législateur promulgue une loi enjoignant les agents des forces de l’ordre à user de leurs armes de service, dans les cas d ‘insubordinations caractérisées, il doit prendre conscience que l’on ouvre la voie à toute maladresse. On ne peut exiger une garantie de résultat à ceux qui sont tenus à ne produire qu’une garantie de moyen.

Mohamed Guerroumi

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