Chapitre XXIV

Crise d’asthme

Berthold se résigna à faire encore un voyage à Mogador. Les cars étaient complets. Il voyagea de nuit. A Mogador, l’un des employés de Joseph l’attendait à la gare routière. Il était harassé, fatigué, il s’engouffra dans la traction avant noire et demanda au chauffeur de mettre les gaz, il avait eu une crise d’asthme la veille et souhaitait se réfugier dans son lit pour dormir.

Joseph heureux de revoir son unique enfant lui avait préparé son petit déjeuner préféré. La cuisinière préparait les msemen, avec du zit argan et du miel sauvage. Berthold remercia son père, il lui dit qu’il se contenterait de boire de l’eau fraîche. Joseph accompagna son fils dans sa chambre et l’installa comme une mère prépare son enfant au dodo, il l’aida à se déshabiller, il ferma les volets et la porte et demanda au personnel le silence total dans le Riad. 

On n’entendait plus une mouche voler. Tout le monde respectait le sommeil de Berthold car tous ceux qui l’avaient vu naître, connaissaient ses douleurs et ses peurs à ses moments de crises. Il passait des nuits à chercher de l’air, et se soignait à l’aide d’un sirop noir et amer et d’une espèce de fumée que lui prescrivait son pneumologue, le Dr Léon Benzaquen.

Rose ne savait pas qu’il était à Mogador. Il lui ferait la surprise le lendemain, lorsqu’il irait mieux.  Après une nuit plutôt sereine, Berthold prit un bain chaud, puis descendit dans le jardin inondé du soleil frais et brillant du matin pour déguster les msmen à l’huile d’argan et au miel sauvage. Il se sentait encore très faible. Il informa le personnel en précisant qu’il dormirait encore après le petit déjeuner et qu’il ne rendrait visite à Rose qu’au courant de l’après midi

A cette époque, la compréhension de l’asthme était encore en évolution et les traitements étaient limités. Dans diverses cultures, des herbes et des plantes médicinales étaient utilisées pour traiter les symptômes de l’asthme. Certaines traditions médicales chinoises et indiennes utilisaient des herbes spécifiques pour aider à soulager la congestion et à faciliter la respiration.

Le docteur Benzaquen prescrivait à Berthold un sirop brun horriblement amer que Berthold avalait en faisant une grimace de dégoût, ainsi que des inhalations de vapeurs de soufre. C’était une pratique courante. On pensait que l’inhalation de fumées ou de vapeurs de certaines herbes ou résines pouvait aider à ouvrir les voies respiratoires.

La Thérapie au soufre était utilisée dans le traitement de l’asthme pour ses propriétés anti-inflammatoires, elle aidait à dégager les voies respiratoires, en nettoyant les poumons et le larynx. Berthold suivait aussi des restrictions alimentaires spécifiques recommandées par des médecins qui jugeaient que certains aliments pouvaient être des déclencheurs potentiels de l’asthme. Il recevait des soins tels que la massothérapie et la kinésithérapie, qui étaient parfois utilisées pour aider à détendre les muscles autour des voies respiratoires et à faciliter la respiration.

Berthold achetait sa poudre de plantes en pharmacie. Elle se présentait dans une pochette en forme d’enveloppe, avec un décor bleu et noir qui représentait des plantes. Il plaçait une bonne pincée de poudre sur une soucoupe ou sur une grille métallique fournie par la pharmacie. Il allumait la poudre, puis au moyen d’un carton assez fin, il fabriquait une cheminée, il aspirait la fumée, puis il couvrait. Le remède agissait sans doute graduellement car les accès les plus pénibles de la crise se calmaient. Il recommençait l’opération lorsque cela lui paraissait nécessaire. 

Avant de quitter Casablanca, Léon Benzaquen lui avait conseillé d’éviter l’humidité de Mogador et de s’exposer longuement au soleil.

Léon Benzaquen, qui fera partie de la vie et de la famille de Berthold jusqu’au décès de ce dernier, a été le premier marocain de confession juive à être nommé ministre après l’indépendance du pays en 1956. Il a occupé le poste de ministre des PTT au sein des gouvernements Bekkai. Il était réputé pour avoir créé les premiers sanatoriums pour soigner la tuberculose. Très apprécié par le roi Mohammed V, il a joué un rôle crucial en faveur de la communauté juive marocaine. Tout doucement, Berthold s’assoupit. Au cours de la journée, Joseph inquiet, écoutait discrètement derrière la porte si la respiration de son fils était régulière.

Slil

 

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