Lorsque Prigogine, le chef du groupe Wagner, a lancé le 23 juin dernier une prétendue révolte contre le régime de Moscou, annonçant qu’il allait destituer Poutine, toutes les chancelleries du G7 ont crié victoire.
A l’annonce d’un convoi de 400 véhicules et blindés roulant vers Moscou, tous les spécialistes s’attendaient, pour le moins, à une guerre civile en Russie.
Déjà, journalistes et intellectuels, peu scrupuleux, en se basant sur les seules paroles d’évangiles de l’OTAN, assuraient enfin la victoire tant attendue de l’Occident, et affirmaient que l’Ukraine pouvait profiter de ce moment de déstabilisation de la Russie pour faire avancer ses pions sur la ligne de défense russe en Ukraine.
L’ancien ambassadeur des Etats Unis en Russie a même soutenu la thèse d’une guerre civile russe, faisant de nombreuses victimes, et poussant Poutine à se cacher.
Selon toutes les analyses, l’affaire était pliée. Prigogine devenait le héros de l’effondrement de l’U R S S, et passait du statut de terroriste activement recherché par le FBI au statut de chevalier blanc, prenant l’assaut de Moscou pour libérer la Russie.
Le bain de sang n’a pas eu lieu, n’en déplaise à tous les médias occidentaux qui passaient l’événement en boucle, persuadés du bien fondé de leurs commentaires dithyrambiques, et aux généraux, invités sur les plateaux qui cacafouillaient en galimatias inaudibles.
Les français ont pu voir que le grade de général, fut- il le chef d’état- major n’est plus synonyme de décryptage, de vérification d’information, d’analyse objective, ou de compétence géopolitique.
Au cours de l’après-midi du 24 juin, on apprenait que Prigogine avait conclu un accord avec le président biélorusse Alexandre Loukachenko pour mettre fin à sa protestation et pour s’exiler.
Rétropédalage immédiat dans toutes les salles de rédactions de nos journaux main- stream, et dans tous les cabinets ministériels concernés pour tenter de rattraper les analyses tonitruantes tenues quelques heures auparavant.
Emmanuel Macron, lui, s’est contenté de jouer son numéro habituel sur le ton tragi-comique désormais bien connu du public français, en parlant de » suivi personnel » de cette affaire…
Biden, Macron, Scholz, Zelensky, tous se sont fourvoyés. La communauté du renseignement américain a été surprise de la rapidité de l’accord qui a été conclu samedi entre Prigogine et Loukachenko.
A Washington, la déception est grande. Les américains constatent qu’il n’y a pas eu de carnage dans les rues de Moscou, et que Poutine reste le » Tsar » incontesté de la Russie.
CNN, avait même annoncé que les services de renseignements américains et occidentaux étaient au courant de la tentative de coup d’Etat de Prigogine.
Ainsi, ils se seraient tous fait lanterner, pour ne pas dire …
En permettant à Prigogine de trouver un asile en Biélorussie, et à ses hommes de choisir de reprendre la vie civile, de s’engager dans l’armée russe, ou de rester dans les rangs de Wagner, Poutine joue gagnant à tous les coups.
Son service de Sécurité, le FSB, détectera tous ceux qui ont soutenu Prigogine.
La Russie, en paraissant affaiblie, a ainsi encouragé l’Ukraine à attaquer les lignes de défenses russes encore plus fortement, et a ainsi pu évaluer les vraies forces de l’Ukraine.
Enfin, Poutine a prouvé aux chefs d’Etats des pays non- alignés sur l’Occident qu’ils pouvaient continuer de faire confiance à la Russie pour les protéger.
Dans cette affaire, Blinken, le Secrétaire d’Etat américain aux affaires étrangères, Biden, Macron, Scholz, ont accumulé un record constant d’erreurs dans leurs évaluation avec la Russie à commencer par le » coup mortel » que les sanctions de l’Occident étaient censés donner à l’économie russe :
– l’emprise de Poutine sur le pouvoir russe,
– la défaite de l’armée russe,
– le manque de munitions et les carences de l’armée russe,
– la victoire de l’Ukraine,
– l’épisode du » coup d’Etat de Prigogine.
Si cette opération est une *Maskirovka, comme le chuchotent certains, elle est parfaitement réussie.
Copernic
P.S. Un thriller de Tom Clancy, Tempête rouge, écrit en 1986, décrit une Maskirovka menée de main de maître par les russes, un génial coup de bluff destiné à égarer les occidentaux.( l’ OTAN et l’ Allemagne, déjà à l’ époque).
(*Maskirovka (en russe : маскировка, littéralement : camouflage) est un terme russe qui désigne l’art de la désinformation militaire).