Le drame ukrainien

Le 24 février 2022 à l’aube, le maître du Kremlin lançait son « opération spéciale ». Personne n’a oublié ces images qui ont fait basculer notre siècle européen vers le passé. Pourquoi l’Europe, coutumière des grandes phrases sans aucun sens, est-elle restée sans réaction quand Poutler (Poutine vs Hitler) a bombardé les villes ukrainiennes ?

Pourtant, il était clair qu’il venait de franchir la frontière entre le voyou classique qu’il était jusque-là et la personne sans foi ni loi qu’il est en réalité. Il démontrait que cette guerre n’était que la conséquence logique du système qu’il avait mis en place pour régler les questions politiques tant internes qu’externes. C’est-à-dire un modus operandi de la guerre entre gangsters de Saint-Pétersbourg.

Le potentat Poutler veut satisfaire ses visées impérialistes tandis que le président Zelensky livre un combat existentiel. Son engagement pour la survie de l’Ukraine signifie que l’existence de son pays est en jeu mais aussi que nous sommes liés à son destin : son combat est le nôtre, sa survie est la nôtre. Comment serait-il possible de discuter avec un voyou de la pègre saint-pétersbourgeoise qui ne connaît pas le mot honneur et qui n’a aucune parole ?

L’Europe assiste à une guerre majeure qui la concerne parce qu’elle a été lâche. Si nous avions mis un coup d’arrêt au début de cette invasion expansionniste, la situation aurait une autre allure.

Les Ukrainiens se battent, parce que la liberté et la démocratie sont des valeurs naturelles qu’ils ressentent dans leurs veines. Ils combattent parce que seul compte le présent jusqu’à la victoire.

La légende des prouesses militaires russes à Stalingrad vole en éclat devant les atrocités commises par la horde russe sur la population civile de Boutcha.

Quand le président Zelensky nous remercie, nous devrions avoir honte de nos palinodies : en vérité, c’est à nous de le remercier pour

l’exemplarité de la population ukrainienne. Cette guerre l’a rendue plus mûre, plus forte et plus centrée sur ce qu’elle est vraiment.

La Troisième Guerre mondiale est bien là que nous le voulions ou pas. L’horizon est clair : il ne faut pas laisser la tyrannie gagner. Nulle part et jamais. Qu’importe le coût pour aujourd’hui. Demain, il sera plus élevé. Si Poutler devait vaincre en Ukraine, qui serait le prochain pays envahi « pacifiquement » ? Serions-nous des somnambules ?

En envahissant l’Ukraine, Moscou concrétise la menace russe qui plane sur l’Europe depuis des décennies. Du fait de cette menace réelle, l’Europe se retrouve légitimée. Saura-t-elle comprendre et en assumer les conséquences dans le cadre d’une nouvelle guerre froide ?

L’OTAN n’a-t-elle pas retrouvé une raison d’être avec cette guerre d’Ukraine ? Serons-nous prêts à assumer les conséquences d’une telle posture géostratégique ?

Kiev n’est pas Berlin en 1945, Kharkiv ne sera pas Grosny. Poutler sera contraint, de gré ou de force, de lever le pied, de négocier et d’arrêter son offensive. Il est en passe de perdre la face devant une opinion russe qui gronde. Va-t-on condamner le peuple russe ou le maître du Kremlin ? Les institutions internationales retrouveront-elles une crédibilité qui jusqu’ici lui fait défaut ?

Poutler n’a pas besoin des médias. Il s’est diabolisé tout seul ! Avec constance et talent si j’ose m’exprimer ainsi. Les faits sont têtus : mensonges perpétuels, assassinats de journalistes, népotisme généralisé et dénis permanents de démocratie,

gestion lamentable du COVID et baisse de la population russe, empoisonnements et déportations d’opposants, extermination de civils, déportations de civils ukrainiens, appauvrissement du pays, cynisme généralisé des siloviki, terrorisme d’état (Wagner et Kadyrov), invasion de l’Ukraine, …

Avec une myriade terrible de noms de personnes et de villes comme témoins de ses actes diaboliques : Anna Politkovskaïa, Boutcha, Boris Nemtsov, Izium, Alexandre Litvinenko, Grozny, Viktor Iouchtchenko, Alep, Boris Berezovski, Marioupol, …

Toute concession à Poutine reviendrait à payer un cannibale pour qu’il nous mange en dernier

Et pour couronner le tout, il pactise avec les trouble-fêtes de la planète : Chine, Iran, Corée du nord, Venezuela, Turquie …

Dans son ombre évolue le « Machiavel russe », Vladislav Sourkov spin doctor de Poutler, qui a inventé les séparatistes russes pour justifier l’invasion du Donbass, planifié l’ « annexion » de la Crimée et instrumentalise les négociations. Poutler est talentueux pour avoir réussi à se rendre tel un paria dans le monde. Sans avoir besoin de nos médias. Même les trolls russes n’arrivent plus à le défendre : sans arguments, ils ne savent être que dans l’invective. Alors, les thuriféraires de la guerre à outrance copient la vieille maxime de Staline selon laquelle « la quantité est une qualité en soi». Il est vrai qu’en Russie, la chair à canon est plus que consommable

Mais cela change progressivement …La montée de la colère arrive de Russie même  :  les  mamans  et femmes des conscrits. Les « Comités de mères de soldats» arrivent à faire ce que Zelensky veut réaliser : faire tomber Poutler.

En Russie comme en Chine, en Turquie ou en Afrique, l’Occident est vu comme une terre où certaines choses, comme la liberté de penser et d’expression ne seraient jamais remise en question.

Vladoff Poutler agissant comme un impérialiste rétrograde, hégémoniste, mégalomane, narcissique, expansionniste et même néocolonial envers son voisin, ce sobriquet résume l’état d’esprit du personnage en quatre lettres : tsar, quoiqu’il soit insultant envers les vrais Tsars.

Rien ne se passe comme il l’avait rêvé : tout échoue même ses tentatives de terroriser les Ukrainiens et de diviser l’UE. Son opération pacifique de trois jours est un échec, ses chairs à canons commencent à ne plus apprécier le scénario, ses alliés le boudent, ça tangue dans son entourage.

Alors désespéré ? Les psychopathes ne le sont jamais. Ils se mettent en colère, ce qui peut les rendre dangereux… pour les autres comme pour eux-mêmes. Quelle belle leçon de courage donnée par l’Ukraine face aux « trolls » poutiniens indifférents aux valeurs. Non, l’Ukraine n’est pas morte, comme le proclame son hymne national. Ses citoyens luttent et meurent pour la cause la plus sacrée : la liberté.

Les trolls européens, donc aussi français, refusent de voir la réalité de la Russie, ce pays sans garde-fous aux mains d’un autocrate ivre de sa puissance pour son projet impérial de rassemblement du monde russe. Mais, avant tout, de destruction de cet ordre occidental qu’il abhorre.

Nous sommes face à un abîme moral, corroboré par le troll Mélenchon en décembre 2017 : « Je ne me sens rien de commun avec les pays baltes. Et l’on traiterait de frères de lointains Lituaniens sous prétexte qu’ils sont chrétiens ! Ce n’est pas mon histoire. »

Le  despotisme  renaît  toujours de ses cendres. L’armée de Poutine avec sa cohorte de momies chamarrées n’est que chair à canon des nouvelles recrues avec au loin la menace atomique. A l’horizon, car il y a toujours un horizon dans la pire des tempêtes, il faudra bien rendre justice pour l’abomination des crimes contre l’humanité commis par les Russes : destruction des installations civiles : hôpitaux, crèches, écoles, massacres, tortures, viols, déportation d’enfants. Poutine ne sort pas des ornières de l’autocratie et du goulag.

La nomenklatura diplomatique mondiale acceptera-t-elle le procès du totalitarisme communiste jamais entrepris ? Il s’agit simplement d’une vision morale du monde, fragile lueur d’espérance dans les ténèbres de la barbarie.

Les médias inconscients ne cessent d’insister sur l’isolement international de la Russie. Alors que dire lors des votes aux Nations Unies quand le résultat est que 75% du monde ne suit pas l’Occident.

Quasi isolée au sein des petits gredins qui suivent en rang serrés l’ours russe, espérant grapiller quelques prébendes, la Chine très confucianiste se présente en conciliatrice.

Churchill fit à propos de Chamberlain la remarque suivante : « Un conciliateur, c’est quelqu’un qui nourrit un crocodile en espérant qu’il sera le dernier à être mangé. »

La duplicité de Confucius avec Poutler

Quand l’empire du Milieu se contorsionne entre sa collaboration ou « partenariat sans limite » avec Putler signé la veille de l’invasion tchékiste et son inquiétude devant la fuite en avant de l’opération de paix russe devenue route sanglante, le gros chat chinois miaule pour suggérer de « respecter l’intégrité territoriale de chaque pays ».

Bizarrerie ou fourberie : pas un mot pour condamner « l’opération spéciale russe » !

Quand on connaît Confucius,   on   sait   alors   que « L’homme sage n’est pas comme un vase ou un instrument qui n’a qu’un usage ; il est apte à tout. » Raffaello Pantucci, coauteur de Sinostan : China’s Inadvertent Empire (2022) est lucide : « Ce n’est qu’un bruit de fond creux visant à amadouer les Européens et les Ukrainiens. Pour décrocher la paix il faudrait que le Chine dise les choses qui fâchent la Russie. »

La réalité géostratégique est que l’Ours et le Dragon sont deux copains dont la fréquentation est peu recommandable : tous deux rentrent leurs griffes pour s’étreindre en public mais règlent en coulisses leurs brouilles de civilisation. Xi Jinping sait pertinemment que, dans le contexte international, la Russie demeure son seul partenaire pour contrer l’Occident : entre les jeux solitaires du mahjong et des échecs, les deux maitres de Pékin et de Moscou préfèrent la tactique à la stratégie. Ils sont les adeptes des dérobades et des postures !

« Qui pousse les feux, envoie le couteau et incite à la confrontation ? » plastronne fièrement Wang Wenbin, porte-parole du ministère des Affaires étrangères en pointant les sanctions baptisées « unilatérales » de l’Occident.

Plus prosaïque, et plutôt que Confucius, j’appellerai Eugène Ionesco à la rescousse pour clore la bouche à ce bonimenteur chinois : « L’expérience nous apprend que lorsqu’on entend sonner à la porte, c’est qu’il n’y a jamais personne. »

Certes, nous n’avons pas les mêmes valeurs anthropologiques, mais nous sommes tout petits.

Le grand écrivain soviétique Vassili Grossmann l’annonçait « L’histoire de l’Occident témoigne d’un élargissement progressif des libertés. L’histoire russe raconte l’inverse, un élargissement progressif de la servitude. » Pour tous ceux qui ont fait la guerre, non pas ceux qui en parlent ou la commentent, il y a une évidence : on sait quand une guerre commence, mais on ne sait quand elle se termine.

Gérard Cardonne

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