Il y a quelques jours, dans une interview au Parisien, Alain Juppé a fait un petit bilan de la politique en considérant que l’affaissement de la droite avait débuté il y a environ dix ans. «Ça s’est détraqué à partir de 2012 quand a commencé une dérive droitière d’une partie de l’UMP qui a conduit au départ des centristes.» Bien sûr, le fait qu’il ne puisse pas encadrer Sarkozy parce qu’il lui a pris la place qui lui était destinée, n’a rien à voir….
Pour Juju, «Seule l’union de la droite et du centre nous permet de gagner les élections.» Là non plus, aucun lien avec les tentatives de séduction de Macron, expert inégalable en la matière.
On ne peut pas lui reprocher son inconstance, puisqu’il s’est toujours trompé sur à peu près tout, avec conviction, y compris sur lui-même. Ce qu’il défend aujourd’hui résume, justement, tout ce qui a fait échouer la droite pour la faire sombrer dans les profondeurs de la politique et c’est la raison précise pour laquelle « sa » droite est tombée à 4,8% et que le RN est à 42%. Il n’y a qu’un énarque pour ne pas arriver à faire le lien!
Alain s’est toujours pris pour Juppéter, manipulé par bien plus intelligent que lui, par un Chirac des grandes heures qui s’est servi de ses talents de gestionnaire de dossiers, de fantassin aveugle et obéissant pour exécuter les basses œuvres. Il a suffi que Chirac dise qu’il était « le meilleur d’entre nous », pour qu’il y croie. Comme les français, eux, n’y ont pas cru, il a décidé, aigri, de régler ses comptes avec eux.
C’est un grand classique chez les politiques, notamment de droite. Toubon est devenu à peine moins gauchiste que Mélenchon, Giscard a passé une bonne partie de son temps à donner des gages à la gauche pour faire moderne, Raffarin, en plus de sa cécité pro-chinoise est devenu démographe et pour le repeuplement des campagnes avec les migrants, sans parler de Bayrou…
Alain se voyait “ en haut de l’affiche » mais il n’a eu que des rôles de porte-serviette et de faire-valoir. Il est probable qu’à l’instar de Fabius qui a eu l’honnêteté d’avouer qu’à sa sortie de l’E.N.A. il avait choisi le PS parce qu’à droite toutes les (bonnes) places étaient prises, Juju a choisi le RPR parce qu’à gauche il y avait déjà trop de jeunes requins aux convictions approximatives et rompus aux techniques de séduction des vieux messieurs.
Alain se pince le nez là où Juppé ne voyait rien de grave « aux bruits et aux odeurs ». C’est vrai, avec le temps, les goûts changent ; les convictions aussi, surtout quand on n’en a pas.
N’oublions jamais, que Juppé prônait – et il ne s’est pas dédit – « les accommodements raisonnables avec l’islam » dans un entretien accordé au Figaro en juin 2015. Pour ceux qui n’auraient pas bien compris, il jugea utile de préciser : « «Arrêtons de nous focaliser sur le foulard ! (…) L’idée d’assimiler les gens, d’effacer les différences, n’a pas de sens. Ni sur le plan moral, ni sur le plan du réalisme (…) Ces différences ne peuvent s’exprimer que si nous partageons un bien commun. C’est l’union dans la diversité, pour reprendre la devise européenne». «De là à considérer qu’un enfant qui ne veut pas manger de porc doit être exclu de l’école publique ou qu’une adulte qui porte un foulard n’a pas sa place à l’université… Il faut garder son sang-froid! » C’est ça, et le sang chaud pensa! (Don Quichotte).
A un âge avancé, il tente une dernière fois de se donner un contenu qu’il n’a jamais eu, en poignardant une famille politique qui n’a jamais été la sienne, espérant probablement pouvoir se consoler avec une babiole de plus sur son plastron.
C’est pathétique.
OT
