Les nouveaux misérables (suite)

Le machiavélisme de l’Ovate

 

Chapitre XXVI

« A vouloir atteindre l’impossible, il avait piétiné tous les possibles ».*

Après, Cythère elle ne le revit jamais et ne voulait plus le revoir ni l’entendre. Ovate n’était pas dupe de la vacuité de ces échanges nés du vide. L’amour derrière l’écran, l’amour caché, l’amour interdit, l’amour ersatz de l’amour… Je t’aime, je t’aimerai, je t’ai aimée ou comment s’aimer à lisière des réseaux sociaux faute d’orées des  bois… 

Grabat sortait de ce vide. Il s’était accroché au vide, perdu dans le monde de la cyber sexualité où tous s’entrecroisent et s’entremêlent à distance. Le plaisir à tout prix  et par tous moyens. A la bourse du sexe il y a  la course au frisson à la liberté, à la consommation du plaisir non coupable. Elle prenait conscience qu’elle s’engouffrait elle aussi dans le piège du vide. Elle s’en voulait et en voulait à Grabat. 

Puis elle entama la salsa du démon en soufflant le chaud et le froid, en répondant à sa folie par des déclarations amoureuses torrides enflammées et passionnées. C’est ce qu’elle fit pendant plusieurs mois. Elle le lisait hésitant, déstabilisé, crédule ou incrédule selon ce qu’elle lui écrivait. Parfois, elle lui donnait une lueur d’espoir qu’elle éteignait aussitôt. Elle lui écrivait tout et son contraire. Un jour elle avançait comme une chatte douce et langoureuse, le lendemain elle lui donnait un coup de griffe. 

Ovate n’avait jamais pardonné aucune trahison, Grabat allait payer ses condescendances, ses suffisances, ses insultes, ses faux rendez-vous, sa trahison, son incapacité à donner de son temps à ce pseudo amour. L’amitié, l’affection, et le soutien moral dont Ovate avait fait preuve à son égard avaient été bafoués, par ce tartuffe habitué à enfreindre toutes les règles et les conventions dont il se réclamait. 

Il avait trahi la Thénardier à sa barbe, il venait de récidiver avec Ovate, mêmes scènes, mêmes mensonges, même misérabilité.

Ovate poussait le machiavélisme jusqu’à siffler aux creux des oreilles de Grabat comme un moustique en vol lorsqu’il bat des ailes. D’autres fois, elle se déplaçait comme un moustique tigre, d’une manière vicieuse, sans bruit, dans un vol nonchalant, prête à le piquer en basse altitude.

Grabat écrivait : « Je ne comprends pas tout avec toi. Je n’ai jamais aimé personne comme je t’ai aimée. Mon cœur a saigné. Je V me préparer, écouter mon cœur saigner »

« Bonsoir mon amour, Je suis dans ma chambre, et je soigne mon stress par la …..fuite. Je ne sais ce que tu enregistres, je ne sais comment ces choses se sont passées et dites. Je t’ai déjà écrit que je ne me souvenais de rien, vu que mes paroles, mes écrits, mes sentiments, ne sont jamais passés par mes cellules grises. Je ressentais une communion intense entre nos poitrines qui communiquaient, sans même demander une approbation. 

G ressenti un KDO divin, la femme de ma rue , celle que j’ai toujours recherchée sur mer ou partout dans le monde où j’ai été, au moins 2 fois le tour du monde. Je souhaite que tu t’en rendes compte, pour mesurer ma désorientation quand tu piétines ma passion. Tu es très importante pour moi. Je t’aime ».

« Mon cœur saigne et c’est mieux ainsi. Je t’aime, moi non plus. Ta versatilité est insupportable, c’est mieux ainsi. Tu as réussi à assassiner un amour, complet et profond à me faire douter de ta sincérité. Tu n’as pas tenu compte de ma déprime profonde. Tu es et resteras mon grand Amour. Je t’aimerais encore, et à mes yeux tu restes pour toujours une partie de moi-même ».

Tous ces mots amplifiaient la colère d’Ovate. Grabat n’avait fait aucun effort pour la revoir Ovate. Il fuyait, et l’insultait parfois grossièrement. C’était l’expression de ses handicaps multiples. 

Elle ne donnait aucun crédit aux baratins qu’il tentait pour garder son punchingball à disposition. 

Ovate poursuivait sa stratégie de destruction. Elle le bloquait sur les réseaux sociaux, laissait une ouverture, débloquait, rebloquait. Elle allait aussi loin qu’il était allé dans ses délires et sa malhonnêteté.  Plus elle lisait la descente aux enfers de Grabat plus elle en rajoutait.  

Soudain, elle eut un ras le bol instantané. Ces conversations sans queue ni tête l’avaient lassée. Il tournait en rond depuis des mois. Tout ce qui devait être consommé l’avait été. Il avait atteint ses limites, Ovate n’avait plus rien à lui dire. Elle eut encore quelques mots d’encouragements pour le consoler de sa détresse, puis elle coupa court à cette relation en un clic de souris, et Grabat a pleuré.  

Quelques mois plus tard, elle reçut quelques coups de fils de Grabat dont elle avait oublié la voix. Il lui disait d’une voix saccadée, rapide, sans doute par peur de se faire surprendre par la Thénardier, combien il avait été bien avec elle, qu’il était son ami, il lui demandait d’ouvrir les réseaux bloqués pour qu’ils puissent se dire encore des mots d’amour. Mais il était trop tard. Il n’avait pas compris la valeur du temps.

Il lui écrivait :“Après que nous nous sommes quittés, je n’étais pas bien, j’ai fait une longue déprime…” Elle lui répondait : “Mais nous ne nous sommes jamais quittés ! Nous n’avons jamais été ensemble !  

À chaque coup de fil, il répétait ce refrain si triste qui peinait Ovate. Elle le laissait parler. Elle était glaciale. Elle ne voulait plus entendre parler de ce dingologue et bloquait tout ce qui était Grabat. Et Grabat a pleuré…

Ovate

*(Martine Benz)

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