Depuis le moyen âge, on nous dépeint la forêt comme un monde hostile où vivent des milliers créatures, et où la loi du plus fort règne sans partage. C’était aussi le royaume des brigands, des sorcières, des bannis de la société.
La forêt est le refuge des insoumis face aux seigneuries. Le message était clair pour les notables : La forêt doit faire peur au peuple.
Aujourd’hui, selon le barde, l’homme est soumis au confort, à l’individualité, au nombrilisme, l’homme est plutôt couard. Les Robins des bois ont disparu, et les meutes de loups sont en progression dans nos villes.
L’image de la forêt persiste dans l’imaginaire des gens. Certes de moins en moins, mais la littérature du XIXe siècle diffuse toujours ce parfum de mystère et d’horreur. Ce combat est perceptible sur les rayons des belles librairies, il l’est moins dans les temples dédiés à la culture des hypermarchés.
Le barde diffuse un autre propos
Depuis plus d’une décennie les médias se sont emparés du sujet, et déversent toutes sortes d’articles sur toutes sortes de supports. Les éditeurs affectionnent particulièrement la prolifération des ouvrages dédiés à ce thème devenu un filon financier de taille si l’on en croit le score des ventes en librairie.
Même l’ovate s’y réfugie pour échapper à son monde virtuel. L’ovate est cette météorite totalement improbable et surréaliste de notre époque. Si elle prenait le temps, de lire et d’appliquer les conseils du barde, elle y retrouverait l’harmonie de son biorythme, de sa bio-résonance et sa paix perturbée par la toxicité du vieux Grabat.
La férocité des végétaux
« Les plantes sont-elles plus féroces encore que les hommes ?»
Cette question a été posée par Arthur Schopenhauer. Le philosophe ajoutait : « Je ne puis passer dans les bois sans horreur.»
Il avait une théorie personnelle sur les sentiments qui oscillent comme un pendule, de droite à gauche, de la souffrance à l’ennui. Selon lui, la vie n’oscille pas entre le bonheur et le malheur, mais entre le malheur et l’ennui. Il cultivait le constat du caractère tragique de l’existence humaine.
Selon, Schopenhauer « Si la satisfaction de nos désirs est insuffisante au bonheur, la condition de l’homme est inévitablement malheureuse.» La souffrance existe par la quête du désir, dès que celui-ci est comblé on ne désire plus, et si on ne désire plus, on ne souffre plus, ainsi l’ennui s’installe.
Pour le barde, le désir et le bonheur sont des sentiments, contrairement à la joie ou la peur qui sont des émotions. Ce courant de pensée n’a jamais effleuré les rêveries poétiques de l’ovate ou du barde qui ont fait de la forêt leur refuge.
Nous avons tous conscience que notre monde actuel est monté en vibrations d’une façon exponentielle, et en intensité d’activités dans de nombreux secteurs.
Schopenhauer s’effraie de la forêt où règne d’un arbre à l’autre une course pour la conquête de l’air, de la lumière et de la terre. Pour lui, l’humanité est un univers sombre, dans la souffrance permanente, et laisse peu d’espace à la lumière.
Le Philosophe est dans l’esprit du siècle des oppositions entre partisans des idéaux révolutionnaires et contre-révolutionnaires, issus d’une lutte acharnée pour pérenniser une forme de régime stable entre républicains, monarchistes et bonapartistes.
En contradiction avec le 18e siècle qualifié de siècle des lumières, l’effet miroir entre Arthur Schopenhauer, (1788 – 1860) et Jean Jacques Rousseau (1712 – 1778) est passionnant.
Jean Jacques Rousseau a construit son œuvre autour de l’idée que l’homme né naturellement bon. Tant qu’il reste dans son état originel il a peu de désirs. Il n’est pas dans la souffrance, il est plus farouche que méchant.
Rousseau traite de l’omniprésence de la nature dans nos vies. C’est l’un des philosophes qui met en évidence notre rapport et notre fonctionnement en écosystème avec dame nature.
Pour le barde, Rousseau est le précurseur de ‘’l’écologie profonde”. Rousseau parlait, il y a plus de 244 ans, de l’importance de la notion d’écosystème contre ceux qui ne voient dans la nature qu’un simple objet inerte.
Nombre de philosophes à travers leurs écrits ont partagé leurs effrois vis-à-vis de la forêt.
Jean-Paul Sartre, dont les aventures végétales se limitaient probablement au café de Flore et à ses excursions sur la côte d’azur, fait dire à Antoine Roquentin, dans son livre La Nausée (1938).
« J’ai peur des villes. Mais il ne faut pas en sortir. Si on s’aventure trop loin, on rencontre le cercle de la végétation. La végétation a rampé pendant des kilomètres vers les villes. Elle attend la mort de nos villes pour les envahir. La nature n’est pas un havre de paix, mais le règne inquiétant et illimité des plantes qui croissent, prolifèrent, se répandent et s’infiltrent partout.
La ville occidentale, qui sépare le monde des hommes de celui de la nature, incarne la volonté humaine de s’arracher à cette toute-puissance de la Silva, d’ériger entre elle et l’homme un mur infranchissable ; un instant d’inattention et le végétal reprend ses droits.»
Et nous ? Les humains ?
On a beaucoup parlé de notre ancêtre australopithèque Lucy. Elle serait morte, il y a 380 millions d’années, selon Anna Alter (docteur en astrophysique).
Selon les experts, elle vivait dans les premières forêts terrestres composées d’Archaeopteris, de fougères avec des troncs qui atteignaient 40 mètres de haut. Elle serait morte en tombant d’un arbre.
L’horreur végétale est-ce possible ?
«Nous sommes un vivant dans les vivants de cet écosystème. Nous sommes liés tels des maillons d’une chaîne de la vie ancrée à la création … Aller dans la forêt, dans la forêt profonde se confier entièrement à la forêt, tout est là, dans cette pensée, n’être soi-même rien d’autre que la nature, en personne. Forêt, forêt de haute futaie, des arbres à abattre, tout est là. » (Jean Jacques Rousseau).
Le barde du Torchis