Le Grand Remplacement

Au nom de l’équilibre de l’écosystème et de la régulation naturelle, dans la forêt se côtoient tout ce qui est splendide et laid, merveilleux et terrorisant, la vie et la mort. La main de l’homme bouleverse ce fragile équilibre, même sur les témoins les plus paisibles que sont nos amis les arbres. 

Depuis 385 000 millions d’années, les arbres sont en éternelle évolution sur terre. Mais dans nos forêts une grande immigration s’amorce avec l’envahissement d’espèces importées d’Inde, du Liban, d’Afrique, d’Amérique, de Mandchourie, de Turquie. Ces nouvelles espèces remplacent  nos essences autochtones. 

Le grand remplacement est-il en marche dans nos forêts de France ?

Nos forêts rhénanes et celles du massif des Vosges sont malades.

Les épicéas sont attaqués par les basidiospores qui infectent les aiguilles au printemps et les assèchent, le scolyte grappille du terrain en entraînant une mortalité conséquente de cette essence. Les experts prédisent la mort de l’essence d’épicéas d’ici 30 ans au plus tard.  L’inquiétude est grande dans le milieu de la sylviculture qui a planté cette essence par millions. 

Les frênes  sont déjà condamnés par un champignon pathogène, le Chalara Fraxinea, que les forestiers appellent la Chalarose. Pour stopper la Chalarose, il faut abattre les frênes. Ce champignon attaque le cœur de l’arbre, le duramen invisible à l’œil nu, est considéré comme le cancer de l’arbre. 

Les chênes La maladie des chênes pédonculés qu’on nomme l’encre (Phytophthora cinnamome) génère une érosion des racines fines, des nécroses racinaires et des chancres suintants sur le tronc des adultes. En se détachant du tronc de l’arbre, l’écorce entraîne  la mortalité de l’arbre. 

L’aulne glutineux n’échappe pas à la triste réalité de nos forêts malades, il est atteint du Phytophthora Alni… Et la liste est bien loin d’être close.

Mais pourquoi cette catastrophe silencieuse et à qui incombe la cause? 

Nos forêts sont malades du réchauffement climatique, des champignons, les scolytes, les chantres, la chalarose, l’encre, mais aussi de la course aux profits. C’est toute la filière qui est à revoir sur un plan d’une grande mutation à toutes les échelles.

l’ONF qui possède tous les indicateurs, va-t-elle redresser la barre, mettre en place un plan de repeuplement avec d’autres logiques sur les nouvelles coupes? 

Non. On replante des épicéas dans les Vosges, des chênes pédonculés, et l’on joue aux apprentis sorciers dans des parcelles d’essais loin des yeux des promeneurs, en toute discrétion: la grande maison aime et cultive le secret.

Lors de mes immersions en forêt, loin des chemins et des sentiers du club vosgien, j’ai découvert des enclos de jeunes pousses avec des espèces surprenantes, loin des yeux des curieux: le sapin de Turquie et le calocèdre des Etats-Unis et d’autres s’invitent pour remplacer l’épicéa.

Le gouvernement, par l’intermédiaire de son président de la République Emmanuel Macron, a annoncé un grand plan de relance de cette filière qui prévoit la plantation de 50 millions d’arbres: le plan d’investissement France 2030 est de 500 millions d’euros. Il a été annoncé au cours de l’été 2021.

«On repeuple massivement et on travaille sur les espèces » a résumé le ministère de l’Agriculture aux assises de la forêt en juillet 2021. Un livre blanc doit ou devait sortir sur ce sujet. La date de parution de ce livre était prévue pour la fin d’année 2021, mais se procurer cet ouvrage est une mission impossible, il est introuvable !

Le but est louable afin de relancer la filière forêt-bois.  

La société botanique de France (SBF) a consulté la liste des variétés éligibles au repeuplement dans lesquelles les Régions ont puisé pour établir des prévisions de plantation. Une inquiétude est née. 

L’ONF et les experts de la société savante ont établi que sur les 129 espèces candidates, 68 sont exotiques. Cette société savante, née en 1854, affirme par la voix de son vice-président: «Notre démarche ne consiste pas à dire qu’il ne faut y avoir recours ni qu’il faut mettre la forêt française sous cloche.»  

D’autres spécialistes disent:  «il faut s’entourer d’un certain nombre de précautions. Aujourd’hui, le risque encouru est supérieur au bénéfice espéré.»

Des études sont en cours pour analyser chacune de ces 68 variétés et vérifier leur capacité à trouver leur niche climatique en France. 

Guillaume Decocq (docteur et professeur en botanique et science végétales et fongiques)  évoque ce phénomène pour attirer notre attention par un exemple: «…venu d’Amérique, le robinier faux acacia a besoin de lumière. Il s’échappe de la forêt pour aller coloniser les milieux adjacents. Il a déjà été introduit en France. On en voit partout le long des voies ferrées et ailleurs. Son développement appauvrit les sols. »

On parle d’eucalyptus, mais cette essence est plus résistante à un climat chaud, il pourrait se transformer en accélérateur d’incendies comme les feux de forêts en Australie.

Il n’y a aucun recul sur les conséquences que ces variétés peuvent véhiculer  comme des bio-agresseurs (parasites) nocifs à nos essences indigènes.

Je reviens sur le frêne et la chalarose,  ce n’est pas le col vert le coupable, mais peut-être le frêne de Mandchourie qui est à l’origine de l’épidémie chez son cousin européen. On peut évoquer le chêne de Hongrie qui a servi d’intermédiaire entre les chênes américains introduits en Europe, et les chênes français pour transmettre à ces derniers le tigre du chêne, une punaise qui réduit la capacité de photosynthèse des végétaux.

‘’On dépense des millions pour des arbres dont on ne sait pas s’ils serviront’’.

Deux observations qui devraient nous amener à réfléchir. La présidente de la SBF, Elisabeth Dodinet déclare:  «Le comportement d’un arbre n’est pas le même dans une forêt et dans une parcelle. Il faut prendre en compte ses relations avec les autres êtres vivants. »

Guillaume Decocq prévient qu’en se précipitant pour repeupler nos forêts, «on oublie de s’interroger sur les raisons pour lesquelles elles sont si vulnérables au changement climatique. »

La solution, serait dans le fameux introuvable livre blanc qui devait paraitre à la fin de l’année 2021. Marcello le barde cherche plus que jamais à se le procurer, ce livre blanc qui livre tous les secrets de la  filière forestière.

Marcello le barde

Partager cet article :

Facebook
Twitter
LinkedIn