Les hystériques de la pensée positive

N’avez-vous jamais été épuisé par un ami américain qui passe toute sa journée à dire Great ! Great ! Great ! 

N’avez-vous jamais eu un cousin revenu d’un ashram en Inde, qui lui, passe son temps à faire le lumineux.  Avec des pantalons très larges en coton recyclé, la tête inclinée dans les discussions, il expose sans discontinuer son amour de l’Univers, du moindre végétal et des animaux…

N’avez-vous jamais retrouvé une amie « nouvellement super épanouie » qui aurait rencontré quelqu’un « d’extraordinaire », dont elle serait tombée éperdument amoureuse, « un type brillant avec qui tu sais j’ai une grande complicité, on se comprend en un regard », et au bout de quinze jours, elle vous annonce que c’est terminé.

Mais à peine quinze jours plus tard, elle vous annonce qu’elle est retombée amoureuse d’un type encore plus génial ! Elle a « rebondi » !

À quand pouvons-nous dater le début de ce courant de pensée, qui ne cesse d’envahir nos vies, nos librairies, le monde de l’entreprise, des médias et des coach, à savoir l’adhésion à la pratique incessante de la pensée positive ?

Combien de best-sellers vendus à des millions d’exemplaires encouragent notre intériorité, par toutes sortes d’exercices, à penser positif, pour que des cascades de choses positives viennent ensuite à nous ?

Combien de « coach stars », présents sur les nouvelles plateformes, avec micro intégré au visage, et balayant leur auditoire depuis une scène, indiquent que la vie serait faite de cercles concentriques dont l’épicentre est VOTRE pensée, reliée elle-même à l’Univers ?

« Modifiez donc cette pensée vers le POSITIF et tout changera autour de vous. »

C’est crédible certes sur le papier, mais dans la vie réelle, j’ai essayé, ça ne marche pas. C’est épuisant!

Naufragé de la positive attitude

Passée l’euphorie du séminaire, c’est totalement impraticable sur le long terme.

Garder le sourire au  visage ou du moins dans l’âme crée une tension permanente. Ensuite, sans vous en rendre compte, vous basculez peu à peu dans une guerre civile interne.

Vous devenez un guetteur, dès que vous observez ou sentez en vous le moindre sentiment de mélancolie, de colère, de peur, de haine, de faiblesse, de honte, de vengeance… bref, les composants éternels de la nature humaine, vous entrez alors en conflit contre ces « mauvaises » pensées intrusives. 

Coach de développement personnel en plein burn out

On voit émerger aujourd’hui, le burn out de professeurs de yoga et de développement personnel qui étaient soumis à la dictature du bien-être, au devoir d’ouverture incessante des chakras, aux bonnes énergies, et à toute cette sémantique des « courants cosmiques ».

Il y a un tel business là-dedans, que ces burn out sont encore sous-médiatisés.

De récentes études, non homologuées, montrent néanmoins que la dévotion excessive et non-stop à la pensée positive engendre des déséquilibres, des névroses et des conflits internes terribles, voire de profondes dépressions.

Pourquoi cela ne marche t-il pas ?

Vive la peur !  Vive la honte ! Et vive le malaise !

Tout simplement parce qu’on ne peut rejeter ou évacuer des pans entiers de notre constitution. La haine, la peur, la colère, la faiblesse, la tristesse, la vengeance, le défaitisme, toutes ces pensées qui nous paraissent négatives sont pourtant saines et normales. Elles sont vitales. Il faudrait même les vénérer, mais cela est difficile dans notre monde présent.

Faites simplement le test d’arriver dans une soirée et de dire bonjour sans sourire, vous serez tout de suite suspect.

Beaucoup optent pour les cascades de rires dès l’entrée, c’est une  parade d’assimilation immédiate.

Terminons avec une formule peut-être un peu pompeuse mais toute simple.

« Chaque réaction engendre une contre-réaction. »

À chaque fois qu’il y a sublimation de la pensée positive, nous créons sans le savoir un renforcement de nos contrées négatives.

Méfiez-vous ainsi des gens qui proclament, après avoir subi les pires atrocités, « vous n’aurez pas ma haine ». 

Celle-ci ne fera que se déplacer, et de façon plus intense, sur d’autres choses…

Un conseil, à chaque fois que nous exprimons une pensée négative, il ne faut surtout pas la maquiller…

Mandrake

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