Strasbourg Jazz Club

Au tout début des années 30, L’américain John Hammond fonde la fédération mondiale des Hot Clubs, dont le but est de promouvoir la musique swing par l’organisation de manifestations musicales ainsi que par la réédition des disques épuisés chez l’éditeur. 

Le mensuel français Jazz Hot, créé en mars 1935 par Hugues Panassié et Charles Delaunay, le fils des célèbres peintres, est la première revue consacrée à cette musique. Éditée en français et en anglais, elle devient le lien des Hot Clubs du monde entier. Ils sont en France plusieurs dizaines, un réseau, qui permet aux amateurs qui les dirigent, d’organiser des tournées de concerts. 

 En Alsace, le Hot Club de Strasbourg est particulièrement actif. Dès le printemps 1935, on peut écouter du jazz et danser au Caveau de l’Aubette, au cabaret Quat’ Sous et au Savoy. Le swing est à cette époque une musique populaire. A ma connaissance, il n’y a pas encore de Hot Club à Mulhouse, même si cette ville a accueilli Louis Armstrong en 1934. 

La deuxième guerre mondiale interrompt ces activités publiques, mais les membres du Hot Club se réunissent en cachette chez leur président, Louis Fritsch, pour écouter les derniers enregistrements américains interdits et frauduleusement importés de Suisse. Le premier concert de l’après-guerre a lieu au premier étage de l’Aubette le 14 janvier 1949 avec comme vedettes Bill Coleman et Don Byas (CD Clifford CJRCD 1002).

Dans les années 40, H. Panassié charge C. Delaunay de se rendre à New-York pour enregistrer des musiciens de style traditionnel, mais ce dernier choisit des jazzmen du nouveau style, le Be-Bop. Panassié, pour qui le Bop n’est pas du jazz, quitte Jazz Hot et crée le Bulletin du H.C. de France. C’est la scission et la guerre des clans. 

Des articles incendiaires paraissent dans les deux revues. Ceux de Boris Vian (Les Zazotteux) en réponse à ceux de H. Panassié (Les Figues moisies) sont particulièrement savoureux et ont été réunis dans un livre: Chroniques de Jazz de Boris Vian. On en arrive à des extrêmes comme ce communiqué du Bulletin du H.C.F « Louis Fritsch, Président du Hot Club de Strasbourg est exclus du H.C. de France. Motif : organisation d’un concert de Chet Baker au Théâtre du Cercle. » 

Le Hot Club de Strasbourg n’existe plus. Les concerts sont désormais organisés par les frères Wolf (Wolf Musique), qui bénéficient des conseils avisés de Robert Noss, un passionné de jazz et de blues. Grâce à eux, les mélomanes ont pu applaudir pendant une trentaine d’années les plus grandes vedettes américaines, entre autres, Art Blakey en 1958 au Théâtre du Cercle, Duke Ellington au Palais des Fêtes, Thelonious Monk au Tivoli, le premier concert de B.B.King en Europe au Palais des Fêtes, les nombreux American Folk Blues Festivals…

Sont alors apparus fin des années 50 les Jazz Clubs : Le Whiskey à Gogo à Kehl, Le Caveau de la Gallia, suivis du Cercle des Amis du Jazz, du Club Européen du jazz, du Faisan, du Café des Anges, du Funambule, du Lazybird…

Si le Club Européen fait exception en présentant régulièrement des musiciens étrangers : A.Mangelsdorf, Jean Luc Ponty  inconnu à l’époque, Charles Tolliver, Stanley Cowell, Franco Ambrosetti…, 

les autres clubs donnent la préférence aux musiciens locaux : Urbain Tonon, Gilbert Eichen (premier prix Jazz partout 1960), Pierre Lamboley, Léon Terjanian, Werner Brum, Pascal Palamidessi, Philippe Leclerc, Georges Cohen, Daniel Dupret…

Depuis la fermeture du Lazybird, aucun Jazz Club n’a vu le jour. On ne se retrouve plus entre amis pour partager la même passion. Il y a bien aujourd’hui des Jam-sessions tous les quinze jours, mais la prestation des musiciens en herbe est limitée à un ou deux morceaux. 

Questionné sur le sujet, Philippe Ochem, directeur du festival Jazzdor confie avoir sollicité la Mairie de Strasbourg pour la création d’un Club culturel avec, entre autres, des soirées Jazz. Il lui a été répondu qu’un manque de moyens ne le permettait pas.. Pourtant à cette époque, la Mairie a fait ériger à grands frais et dans l’indifférence générale trois énormes totems gravés d’une hauteur de plusieurs étages le long de la promenade près du pont Elmerforst, Montagne Verte. Un gaspillage des deniers publics dont auraient pu bénéficier la Culture !

Cole Porter

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