Chapitre IX
Départements ou départements ?
On peut lire et entendre à longueur de journée qu’un tel est un Haut-Rhinois et tel autre un Bas-Rhinois. Il est très rare que le qualificatif soit simplement un Alsacien…
Pourquoi continuer à se référer à notre appartenance à une des deux circonscriptions administratives de l’État en Alsace ?
Les départements (avec un petit « d ») du Haut-Rhin et du Bas-Rhin existent certes depuis 1790 mais ils ne sont que le maillage administratif territorial de l’État en région avec à sa tête un préfet de la république qui dirige l’administration déconcentrée sur ce territoire. Il ne faut pas les confondre avec les Départements (avec un grand « D ») qui sont des collectivités territoriales décentralisées avec à leur tête, des élus que sont les conseillers départementaux
En Alsace, les deux Départements n’existent plus depuis leur fusion et la création le 1er janvier 2021 de la Collectivité européenne d’Alsace (CEA). Il n’y a plus qu’une seule collectivité qui exerce ses compétences sur toute l’Alsace.
Qu’est ce qui représente finalement le mieux une population sinon la collectivité dans laquelle elle vit et où ses élus (les Conseillers d’Alsace), exercent les compétences et appliquent les politiques publiques alsaciennes qui sont les leurs. Faut-il vraiment plutôt prendre comme référence l’appartenance de cette population à un territoire purement administratif de l’État ?
Lors des dernières élections régionales en juin 2021, il n’y avait et ce pour la première fois, qu’une seule circonscription électorale en Alsace, celle de la CEA. Donc, que des listes uniques pour toute l’Alsace.
On dit et on écrit que la Région Grand Est serait un territoire purement administratif sans identité (ce qui est vrai), et on ne veut certainement pas être appelés « Grandestien » (ce qui est moche), alors pourquoi se qualifier encore entre Alsaciens de Haut-Rhinois et de Bas-Rhinois puisque cela fait aussi référence à des territoires administratifs ?
Un territoire administratif acquiert-il avec le temps une identité et ses habitants un sentiment d’appartenance ?
Qu’en sera-t-il du Grand Est dans quelques années s’il subsiste ?
Il serait beaucoup plus clair et logique d’arrêter ce cirque chez nous en Alsace et d’employer simplement le qualificatif d’Alsacien, que l’on vienne de Mulhouse, de Colmar ou de Strasbourg.
Commençons par cela, commençons par bien fusionner dans nos têtes car cela ne pourra qu’aider les élus de la CEA à bien mettre en cohérence (ce qui semble bien difficile) les deux ensembles de politiques départementales dont ils ont hérité le 1er janvier 2021. C’est, me semble-t-il, un préalable avant de prétendre exercer en plus, les compétences régionales sur l’ensemble de l’Alsace…
Souvenons-nous qu’à l’occasion du référendum alsacien d’avril 2013, dont c’est ce mois-ci le triste 10ème anniversaire, il y avait deux circonscriptions électorales (67 et 68), ce qui était normal compte tenu du fait que s’agissant de fusionner les deux Départements et la Région ; il était par conséquent impératif de demander leur avis aux futurs mariés.
Les électeurs haut-rhinois ayant dit « non », la cause était entendue. Nous en subissons, et n’avons pas fini d’en subir les conséquences…
En faisant le calcul à l’échelle de la seule circonscription électorale alsacienne, le « oui » en 2013, était majoritaire avec 58% des votes exprimés. Aujourd’hui avec le débat sur la sortie de l’Alsace du Grand Est, en cas de référendum, il y aurait également une seule circonscription avec beaucoup plus de chance que le « oui » l’emporte. Cependant, il n’est pas certain qu’un référendum soit organisé car si le législateur nous a retiré les compétences régionales sans nous consulter en 2015, il devrait logiquement nous les rendre de la même façon.
Comptons néanmoins avec le courage politique des jacobins qui nous infligeront vraisemblablement cette consultation. Mais s’ils exigent comme en 2013 que le « oui » représente 25% des inscrits, c’est, de mon point de vue, un échec assuré car les sujets institutionnels ne mobilisent personne et au premier chef pas les élus alsaciens qui ne font rien sur le terrain pour expliquer aux électeurs la plus-value que représenterait pour eux un retour des compétences régionales dans le giron de la CEA.
Les velléités récentes de consultation et d’information via internet par la CEA, n’y changeront rien car c’est se couper de toute une frange de la population concernée qui est fort éloignée du Web.
En conclusion, celles et ceux qui veulent défendre l’Alsace se doivent d’abord de raisonner et d’agir en tant qu’Alsaciens et non plus en tant qu’Haut-Rhinois ou Bas-Rhinois. C’est le préalable obligé pour éviter des querelles picrocholines qui n’ont aucun sens et ne peuvent que desservir la cause alsacienne.
Il faut toujours se demander ce que ces débats « alsaco-alsaciens » donnent, « vus de Pékin »…
Jetzt langt’s !
L’Alsacien