Quand le Centre se divise, les extrêmes triomphent : leçon new-yorkaise pour la France

La chronique de Patrick Pilcer

À New York, le résultat est tombé : Zohran Mamdani, figure emblématique d’une gauche socialiste et radicalisée assumée, a conquis la mairie. Derrière son sourire, façon Bardella, et ses slogans inclusifs, se profile une idéologie bien plus clivante, nourrie de clientélisme communautaire et d’antagonisme civilisationnel. Mais ce n’est pas seulement la victoire de Mamdani qu’il faut analyser : c’est la défaite du bon sens politique — celle d’un camp modéré, libéral, rationnel, incapable de s’unir, alors qu’il pouvait gagner.

Car à New York, le centre et la droite se sont tirés dessus au lieu de viser juste. Deux candidats, deux egos, deux choix de seconds couteaux aussi. D’un côté Cuomo, ancien ministre de Clinton à la fin des années 90, de l’autre Sliwa, créateur des fameux « Guardian Angels » des années 80. Deux candidats du XXème siècle, en 2025… Résultat : la gauche radicalisée, wokiste affirmée, mais unie, organisée, mobilisée, modernisée, a triomphé même si elle ne représentait pas la grande majorité de la ville de New York et sa diversité. Ce n’est pas la première fois que l’histoire se répète : elle bégaie à chaque fois que les républicains raisonnables oublient qu’en politique, l’union n’est pas un luxe moral mais une condition de survie démocratique.

Et c’est bien là la leçon pour la France.

À Paris, comme à l’échelle nationale, le Centre et les Républicains donnent le spectacle d’un archipel d’egos en quête de leadership, plutôt qu’un projet collectif. Chacun veut être le sauveur ; personne ne veut être le second. La Gauche à Paris peut sourire, les extrêmes partout en France se frottent les mains : le Centre se fragmente, et la République s’effrite. Tant que le Centre et les Républicains n’auront pas compris que leur défi majeur est de réunir ce qui est épars, avec une offre moderne, actuelle, et non de se diviser, et de refaire le combat perdu des dernières élections, ils perdront tous les scrutins, même s’ils sont majoritaires.

Mamdani a su parler à une jeunesse dépolitisée mais en quête de cause, à des minorités désabusées, à une classe moyenne culpabilisée. Il a surfé sur les fractures culturelles comme d’autres sur les vagues du populisme. Ses opposants n’ont jamais cherché à s’unir, et à créer les conditions de la victoire. Ils ont démobilisé leur électorat. Résultat : l’idéologie a gagné contre la raison.

En France aussi, la bataille culturelle a commencé, mais beaucoup refusent encore de la livrer. On croit que la “raison” finira par s’imposer, qu’il suffit de rappeler les chiffres, la compétence, la gestion, le bon sens. Erreur fatale : le cœur précède la tête et choisit le bulletin de vote.

Celui qui n’offre pas d’émotion laisse la colère, la peur ou le ressentiment s’en charger.
Et comme à New York, on se réveillera peut-être un matin avec des élus qui parleront au nom du peuple pour mieux agir contre lui.

Ce qui s’est joué à New York, est plus qu’un scrutin municipal. C’est un avertissement mondial : les démocraties qui divisent leur centre perdent leur équilibre. Et quand le centre s’effondre, les extrêmes ne se contentent jamais du pouvoir local : ils veulent le pouvoir total.

Il est temps, pour les forces modérées en France, d’apprendre de New York. N’attendons pas un nouveau Tocqueville et la mise à jour de « De la Démocratie en Amérique » pour cela. Tocqueville nous disait qu’il « voulait imaginer sous quels traits nouveaux le despotisme pourrait se produire dans le monde ».

Mais aussi ; « Rien n’est plus merveilleux que l’art d’être libre, mais rien n’est plus difficile à maîtriser que la liberté elle -même. La société développera une nouvelle forme de servitude qui recouvrira sa surface d’un réseau de règles complexes, impénétrables même pour les esprits les plus originaux et les personnalités les plus dynamiques. » Quelle prémonition !

A nous à présent de murir les leçons venant des Etats-Unis, et de retrouver l’esprit Radicalement Républicain de notre beau pays, avec au cœur nos valeurs et principes : Liberté Egalité Fraternité Laïcité !

Au Centre et aux Républicains, en France, ici et maintenant, de comprendre qu’à trop vouloir être chacun le premier, on finit par tous être les derniers.

Et que le courage politique n’est pas de se distinguer, mais de se rassembler.

Patrick Pilcer

Président de Pilcer & Associés, conseil et expert sur les marchés financiers, auteur de « Ici et maintenant – lecture républicaine de la Torah » (préface du Grand Rabbin de France, Haïm Korsia, éd. David Reinharc). Prochain livre à paraître le 12 novembre 2025 : « Radicalement républicain. Le mur n’est pas une fatalité. » Éditions InterVision.

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