Le guignol de la flottille

Je croyais que la saison du melon était terminée. 

Je faisais fausse route. En tout cas, le melon de Thomas Guénolé, lui, n’arrête pas de grossir. 

On le savait déjà puisque, sur les réseaux sociaux, il a inscrit « Dr Thomas Guénolé », alors qu’il est « docteur » en science politique. Je sais que, chez les Anglo-saxons, on met souvent en avant son titre universitaire (et encore… un des gags récurrents de Friends, c’est l’inénarrable Ross qui se fait chambrer parce qu’il se présente comme docteur alors qu’il a un doctorat de paléontologie), mais dans l’usage, en France on ne l’emploie quasiment jamais comme forme d’adresse sociale. 

Voici donc notre docteur es melonite aiguë qui se lance dans le seul en scène. Il va raconter son périple à Gaza et surtout, sa captivité et sa torture en prison. 

Pour vous donner un ordre d’idée, Guénolé qui parle de son expérience de la torture en prison, ce serait un peu comme une influenceuse qui nous expliquerait la famine en Afrique, parce qu’elle a fait une cure « détox et jeûne » dans un hôtel All inclusive en Casamance. 

Ou alors un footballeur qui nous expliquerait ce que c’est que d’être paraplégique, parce qu’il s’est fait une entorse au genou et qu’il a dû rester allongé une semaine.

Donc, Guénolé a été retenu 3 jours en prison et il nous en fait un spectacle. 3 JOURS. Ensuite, il est rentré en France, tout sourire, avec sa bonne bouille de gros bébé joufflu et sans la moindre égratignure.   

À vrai dire, heureusement qu’il n’a pas eu une seule égratignure ! Imaginez… s’il avait eu un furoncle au cul, ce n’est pas une soirée de seul en scène qu’il aurait monté, mais une comédie musicale de 2h 40 !  Ou un film plutôt. Oui, c’est ça, un documentaire. Avec moult gros plans sur l’objet de sa souffrance… (ne me remerciez pas pour les images).

De toute façon, je suis sûre que ça aurait été son rêve, un long métrage sur Lui et son petit périple. Avec de belles images de Lui sur le bateau, son visage buriné face à la mer, les yeux mi-clos, fixant l’horizon… ou encore Lui, en train de faire des heu… une pompe, sur le pont… et puis, Lui toujours, incarcéré, torturé, les mains sur les oreilles, obligé d’écouter l’intégrale d’Enrico Macias… laï laï laï laï… Les salauds !

Mais pour l’instant, aucun producteur n’ayant souhaité investir sur son histoire, Docteur Melon, à défaut du Festival de Cannes, nous offre un spectacle, dans lequel, le ton solennel et la mine tragique,  il raconte, qu’il n’y avait pas de douches en prison et qu’il a dû « mariner dans sa sueur pendant des jours et des jours » (sachant qu’il s’est écoulé 3 jours et 2 nuits entre son incarcération et son expulsion, il rejoint donc la moyenne des français crados qui ne se lavent pas quotidiennement). 

Et puis pensez-donc, il n’arrivait pas à dormir, car « toutes les deux heures, il était réveillé par la lumière et le bruit ». (Un peu comme dans les Ibis Budget, qui sont très mal insonorisés). 

Il a demandé de l’eau aussi. Rien. Pendant deux heures. Deux heures. (Tous ceux qui ont été déjeuner dans un restau de plage au mois d’aout connaissent bien cette attente insoutenable). 

Thomas Guénolé c’est l’histoire d’un mec qui a trouvé, dans la pastèque palestinienne, un excellent prétexte pour montrer partout son gros melon. 

Parce qu’au fond, il s’en fout, de ceux qui croupissent vraiment derrière des barreaux, depuis des mois et des années, comme il s’en fout des otages, ces fantômes hagards, qui reviennent méconnaissables de l’enfer, quand ils ont la chance d’en revenir. 

Lui, il raconte pour exister. Et les Palestiniens, ceux qui sont occupés à reconstruire leurs maisons ou à éviter les exécutions sommaires du Hamas, n’ont pas grand-chose à gagner de cette récupération. Une photo dédicacée, peut-être. En attendant le livre. Car oui, après les vidéos sur les réseaux sociaux, après avoir écumé les plateaux télé, après le one man show, il y aura un livre, forcément. 

On ne connaît pas encore son titre. 

Mais il sera facile à reconnaître :  sur la couverture, il y aura la tête de monsieur Guénolé.

Nathalie Bianco

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