Mais moi je fonds

« Conjuguez être et avoir à tous les temps simples de l’indicatif de votre plus belle écriture ».

C’est la première fois que je me pose et que je regarde mes sixièmes. Ils sont vraiment tout petits. Minuscules. Chatons en diable.

Je m’attarde sur Ali et sa trousse « interdit de me gronder ».

De grands yeux noirs brillants frangés de cils infinis ; des boucles folles éparses qui dansent dans tous les sens, comme heureuses d’être là ; ce que j’appelle des joues à bisous, de bonnes joues de poupon Corolle. 

Il s’applique. Un bout de langue sorti s’échappe de côté, rebelle et rigolote dans ce visage grave et studieux. 

Soudain, alors que je suis perdue dans la contemplation de cette enfance digne d’un Doisneau, il lève la tête de son exercice, sourit d’un sourire plus grand que lui ponctué d’une fossette adorable et d’une voix fière et flûtée m’annonce : « Zé fini mes verbes, maîtresse ! ».

Je n’oblige personne à fondre. Mais moi je fonds.

Cécile Chabaud

Partager cet article :

Facebook
Twitter
LinkedIn