Où est passée l’Ukraine ? 

L’Ukraine est toujours là, mais le monde l’a oubliée. 

Il y a deux ans et demi, l’invasion russe était censée être un cataclysme mondial, un tournant pour l’Europe et pour le reste du monde. Les gouvernements occidentaux s’étaient précipités, multipliant les sanctions et les promesses de soutien. Aujourd’hui l’Ukraine est un vieux dossier qu’on range sous le tapis, comme une mauvaise affaire qu’on préfère ne plus voir.

Depuis octobre 2023, une distraction bien plus médiatique et rentable a pris la tête du podium. Israël. Ce petit pays, pris en étau entre critiques et soutiens, est devenu l’objet des débats les plus passionnés du moment. Le conflit israélo-palestinien est plus facile à digérer avec des images chocs, des opinions tranchées, une réalité trop claire pour se poser trop de questions. La guerre en Ukraine est trop complexe, trop lointaine, trop sérieuse pour susciter l’indignation à la mode.

Israël est le parfait alibi. La manœuvre est bien rodée.Tout le monde a son mot à dire sur Israël. Ce pays devient le terrain idéal pour les faux amis de la paix, ceux qui veulent se poser en arbitres de l’histoire sans vraiment se mouiller. On critique, on défend, on instrumentalise, mais le processus de paix est toujours dans le placard. Le pogrom, les violences, les bombes, les attentats, ne sont qu’un fond sonore qui occupe l’espace médiatique, pendant qu’on oublie qu’un autre conflit, plus proche, peut redessiner les frontières de l’Europe.

L’Ukraine c’est un peu « trop compliqué ». Chiant, encombrant. Trop de souveraineté à défendre, trop de principes à respecter, trop de géopolitique à gérer. C’est plus cool de se vautrer dans des débats faciles, où le bien et le mal sont déjà clairement définis, où l’on peut jouer à « j’agis pour la paix », « free palestine », « de la rivière à la mer », ou faire des croisières d’enfer sur les flottilles équivalentes au Ponant, en toute gratuité et en toute sécurité. C’est quand même plus drôle que l’Ukraine, avec ses tranchées, ses bombardements et sa résistance acharnée, c’est juste trop tragique pour être à la mode. Alors, on laisse Kiev dans l’ombre et on s’agite autour de la guerre nucléaire en Israël dont la survie est en jeu certes, mais qu’importe, ça fait un max de buzz.

Au début de la guerre, Emmanuel Macron avait joué la carte de la solidarité totale avec l’Ukraine, comme il l’avait fait le 7 octobre avec Israël, en insistant sur la nécessité de défendre la souveraineté des peuples, le droit des peuples à se défendre avec la promesse de les soutenir militairement.

Mais voila que 2023 arrive, et, que soudain, Macron adopte une nouvelle stratégie. Il veut « comprendre Poutine ». Une manœuvre de fin diplomatique bien ficelée comme Macron sait faire, parce qu’au fond, qui a besoin de principes quand on peut ménager Poutine et ses ambitions ? La souveraineté ukrainienne devient un détail, à côté des intérêts économiques et la crainte d’une montée des prix de l’énergie.

C’est là toute la magie de l’ambiguïté à la Macron. Manipuler les mots, jouer sur la peur d’une guerre nucléaire pour justifier l’inaction. Et même si la stabilité de l’Europe volait en éclats, ce ne serait pas bien grave, tant que l’on garde une posture politiquement correcte avec Moscou. Après tout, pourquoi se battre pour un petit pays lointain quand on peut ménager les grands acteurs de l’échiquier ?

De l’autre côté de l’Atlantique, Trump considère que l’Ukraine est un « conflit lointain et coûteux », un problème de l’autre côté du monde, trop cher et trop complexe. 

Poutine se lèche les babines en souriant, il sait que de toute façon, l’Occident est plus occupé à se disputer qu’à agir.

Mais ce n’est pas la fin de l’histoire. Le sommet Trump-Poutine prend forme. Un spectacle d’apparences est en gestation. On y jouera à discuter de la paix, avec l’hypocrisie et la complicité internationale d’usage.

Le monde est tout simplement trop fatigué, trop occupé à parler de tout et de rien. La guerre en Ukraine comme la guerre en Israël ne sont pas des tragédies locales, ce sont des tests pour l’ordre mondial. Si l’Ukraine ou Israël tombent, ce ne sera pas seulement des défaites militaires. Ce sera la défaite des principes de souveraineté et de droit international. Ce sera la fin de la démocratie déjà en difficulté, la victoire de la violence, de l’impunité, et de l’ignorance.

Lorsque la violence devient une norme, tout le monde s’y habitue. Il faut rappeler que le combat ukrainien, comme le combat israélien sont ceux de la liberté, de la justice et de la stabilité mondiale. Ne pas les soutenir pleinement, c’est prendre le risque d’une paix illusoire et d’un avenir instable. Et là, il sera trop tard pour venir chialer dans le giron de l’oncle Sam.

Séraphine

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