Sarkozy : un soutien à un délinquant qui fait désordre !

Nicolas Sarkozy est donc le premier ex-président français à être condamné à de la prison ferme. Le jugement du 25 septembre 2025 du Tribunal correctionnel de Paris est assurément un fait marquant dans la vie politique française. Dès que le jugement a été connu, un certain nombre de soutiens de Sarkozy se sont offusqués et ont tiré à boulets rouges… sur une justice qu’ils jugent partiale. Tous ces Français qui ont trouvé ce jugement trop sévère et se sont révoltés contre le mandat de dépôt de l’intéressé sont souvent les mêmes qui réclament davantage de sévérité et surtout des peines de prison ferme à nos juges lorsqu’il s’agit de délinquants lambda ou de « racailles » issues des banlieues. À un moment donné, il faut rester cohérent. Les lois sont les mêmes pour tout le monde, et Sarkozy est un délinquant ! Comment des gens souvent dotés d’une grande intelligence peuvent-ils soutenir un délinquant ? Que des politiques pourris soutiennent leur congénère passe encore pour normal. Mais que d’autres ne se rendent pas compte qu’ils remettent en question le bon fonctionnement de notre société et même de notre démocratie me sidère.

Rappelons juste le « profil » du condamné. Il en est là à sa troisième condamnation. Dans l’affaire des écoutes téléphoniques, Paul Bismuth, pardon, Nicolas Sarkozy, a été condamné à trois ans de prison dont un ferme. Dans l’affaire Bygmalion, il a écopé d’un an de prison dont six mois fermes. Dans les faits, aux yeux de la justice, Sarkozy n’est rien d’autre que ce qu’on qualifie de « personne défavorablement connue des services de police et de la justice ». Certains y verront un acharnement, mais il faudrait plutôt prendre conscience que la justice ne s’est pas trompée à trois reprises. D’autres encore y verront la vengeance des juges rouges, argument avancé autant par Sarkozy que par Marine Le Pen. Un peu facile quand on s’est fait prendre les doigts dans le pot de confiture ! Ce raisonnement ne peut se fonder en plus sur aucun élément factuel et fait fi des 380 pages qui motivent la condamnation de Sarkozy. La critique de ces condamnations, en première instance ou en appel, remettrait en cause le jugement rendu par cinq tribunaux différents composés de juges différents, auxquels il faut ajouter les procureurs, substituts et enquêteurs qui ont participé à la constitution de ces dossiers. La théorie d’un gigantesque complot contre Sarkozy ne tient donc pas la route, et la fracture entre pouvoir judiciaire, indépendant, et une partie de la classe politique soutenue par une partie des Français ne peut être qu’un danger gravissime pour notre démocratie déjà mal en point par ailleurs. La réaction de l’ex-président de la République, l’appel au peuple contre des juges soi-disant politisés, ne peut que nourrir le populisme et fragiliser nos institutions démocratiques.

Rappelons juste que, dans le dossier libyen, Sarkozy n’est pas le seul à être condamné, et ce sont des personnages au plus haut de notre État qui ont été condamnés en même temps que lui. Les juges ont estimé que l’association de malfaiteurs qu’il a constituée avec Claude Guéant, Brice Hortefeux et Ziad Takieddine avait pour objectif de préparer une corruption au plus haut niveau de l’État. Ils ont listé un faisceau d’indices, des pièces de procédures permettant de matérialiser cette association. Des « faits d’une exceptionnelle gravité », selon les juges, qui ont considéré « qu’il a mis ses fonctions ministérielles à profit pour préparer une corruption avec le numéro deux du régime libyen [Abdallah Senoussi], condamné [en 1999, à perpétuité] pour des faits de terrorisme ».

« Un délit contre la nation, l’État et la paix juridique », ajoute le jugement. « Des faits de nature à altérer la confiance des citoyens dans ceux qui les représentent. » Ce sont des Français, et non des moindres, qui sont allés demander de l’argent à une dictature, n’hésitant pas à rencontrer celui qui avait organisé l’attentat contre le vol UTA 772 : 170 morts, dont 142 Français. Cet argent-là est taché du sang français !!!

Bien sûr, les soutiens de Sarkozy vont nous dire qu’on aurait pu exonérer l’ex-président d’un passage par la case prison de trois semaines, dans laquelle il a bénéficié de manière honteuse d’un régime de faveur, tandis que d’autres prisonniers sont confrontés au délabrement et à l’insalubrité de notre univers carcéral. Mais rappelons aussi ici les propos de l’intéressé lui-même, tenus lorsqu’il était en responsabilité des affaires de notre pays : « Qu’on m’explique comment on empêche un délinquant de récidiver si on n’a pas le courage de le mettre en prison ? » ; « On doit arrêter l’inexécution de la peine. Une peine prononcée doit être une peine exécutée. » ; « Toute peine supérieure à six mois sera pleinement exécutée. » Il ne pensait peut-être pas que ses propos s’appliqueraient un jour à lui-même… De même, ce sont les politiques eux-mêmes qui ont durci la législation et la répression de ces actes de délinquance !

Pendant que beaucoup de Français trouvaient scandaleuse la condamnation et l’incarcération de Sarkozy, un autre procès a été quelque peu éclipsé. Je n’ai pas entendu beaucoup de gens réagir à la condamnation de Cédric Jubilar à 30 ans de prison pour le meurtre de son épouse Delphine. Un jugement rendu par un jury populaire sur des faisceaux de preuves, des soupçons, mais sur aucun aveu, aucune découverte de corps, aucune scène de crime, aucune preuve formelle… Alors qu’on remet en cause le jugement de Sarkozy, fondé sur un acte d’accusation de près de 400 pages et documenté par des preuves réunies au bout de dix ans d’enquêtes, peu de Français ont trouvé à redire sur un jugement où des citoyens comme vous et moi, tirés au sort par la Cour d’assises, envoient Jubilar derrière les barreaux pour 30 ans ! Là, pas de juges rouges. Seulement une intime conviction des jurés. Mais, entre Sarkozy envoyé en prison pour association de malfaiteurs et un Jubilar condamné à 30 ans alors qu’il est peut-être innocent, je dis bien peut-être, je préfère accorder le bénéfice de mon doute à Jubilar, au casier judiciaire jusque-là vierge, que de condamner un potentiel innocent. Il convient d’avoir toujours à l’esprit la possible erreur judiciaire en Cour d’assises, comme celle qui a coûté la tête à Ranucci, plutôt que de s’apitoyer sur le sort d’un ex-président délinquant récidiviste.

Marc Assin

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