La raison perd la bataille des médias mais gagnera la guerre du réel

La chronique de Patrick Pilcer

Nous assistons à un renversement discret mais profond : la raison, cette lumière héritée des Lumières, recule devant les obscurantismes, les dictatures intellectuelles, les dogmes du moment. L’Occident, jadis vigie de la raison, gardienne des libertés, vacille sous les coups coordonnés de la pensée unique, des idéologies sans nuance et de nos ennemis d’aujourd’hui, l’islamisme et le collectivisme.

Deux symptômes parmi d’autres : le débat insensé sur l’impôt en France et la façon dont nous abandonnons notre allié Israël, deux faces d’une même pièce.

La reconnaissance symbolique d’un État : capitulation morale et intellectuelle

Quand Emmanuel Macron annonce, le 22 septembre 2025, la reconnaissance d’un « État palestinien », cette décision n’est pas un acte de paix : c’est une posture symbolique sans fondement, car aucune des conditions substantielles de la construction d’un État souverain n’est remplie. Strictement aucune, quand dans le même temps on refuse de reconnaître Taiwan, le Kurdistan, voire la Kanakie. 

Par ce geste, la France, par la voix de son actuel Président, et une partie de l’Occident, poussée par Macron, cèdent au langage du terrorisme le plus barbare, oublient l’histoire et empêchent une réelle solution pour tous.

On pourrait objecter : « ce n’est qu’un geste diplomatique ». Mais ce geste porte le triste déguisement d’une capitulation totale devant le chantage du terrorisme. Il transforme la barbarie en interlocuteur légitime. Il dit que le meurtre et l’enlèvement peuvent être récompensés.

Pire, il pousse les barbares à aller plus loin encore, puisqu’on leur donne raison. Plus grave encore, il incite les pays modérés à revoir leur position et à s’aligner avec les barbares. 

Depuis la capitulation de Macron, l’Egypte parle d’Israël comme de     «l’ennemi», les Emirats Arabes Unis, modérés parmi les modérés, revoient leurs accords. Ils ont peur que les islamistes, présents et menaçants chez eux aussi, ne voient par ce geste la victoire de leurs idées et le feu vert accordé à leur violence.

Si l’on refuse de reconnaître Taïwan (où un État démocratique existe, avec institutions, société civile, économie florissante), si l’on ne reconnaît pas le Kurdistan, pourquoi reconnaître un « État palestinien » à ce stade ? Pourquoi ne pas reconnaître également l’indépendance de la Kanakie ? Faut-il que les Kanaks prennent des otages, fassent régner la terreur et mettent à feu et à   « sang le caillou» pour qu’on leur donne raison ? Ne sommes-nous pas des  «colons » en Nouvelle Calédonie ? Y avait-il un royaume de France à Nouméa il y a 500 ans, mille ans, deux mille ans ?

Céder par cette reconnaissance, c’est renoncer à la logique du droit, céder au récit victimaire manipulé, c’est valider la démagogie, c’est renoncer à la force de la raison.

Cette décision est une défaite dans la bataille des idées, l’inversion des rôles Victime/Coupable est des plus classiques : l’agresseur devient partenaire du discours international, tandis que la victime — Israël — est traitée en oppresseur présumé. La communication l’emporte sur la réalité.

Ce défaut de raisonnement se retrouve aussi dans notre société où la police devient l’oppresseur et les délinquants « des petits anges », les victimes réelles sont, elles, invisibilisées…

L’impuissance au nom des nôtres : le cas Boualem Sansal

Si l’on parle de défaite, on doit évoquer ce renoncement scandaleux : notre incapacité à arracher la liberté d’un citoyen que la France a adopté — Boualem Sansal — emprisonné depuis novembre 2024 par l’Algérie pour   «atteinte à l’unité nationale ». Boualem est un otage et Macron n’arrive pas à obtenir sa libération, même en renonçant à nos valeurs, même en reconnaissant un état palestinien, leitmotiv pourtant du pouvoir algérien.

Pendant que l’Élysée vante ses gestes symboliques à l’international, cet intellectuel français croupit dans les geôles d’Alger, en otage. Quand le pouvoir ne sait plus défendre ce qu’il incarne, il déchoit du devoir d’État.

Cette impuissance ne se limite pas à la diplomatie : elle s’étend aux sphères internes, au régalien, lorsqu’on n’arrive plus à expulser les étrangers en situation irrégulière. Où est le principe de souveraineté territoriale, où est le respect de notre droit, où est le respect de la volonté du Peuple ?

Partout, la France ploie sous les idéologies qui inversent le sens même des mots : « la police tue », l’ordre devient oppression, le contrôle devient racisme, l’identité devient stigmatisation. Le citoyen lucide devient l’ennemi public.

Le règne de la pensée unique et l’hégémonie médiatique

L’Occident se censure. En France, les médias publiques et les grandes universités sont infiltrés par ce mélange toxique d’« islamo-gauchisme », de repentance postcoloniale et de censure de plus en plus affirmée, de plus en plus violente. L’opposant est promptement catalogué « extrême droite »,  «fasciste », ou « raciste », sans débat sérieux.

La gauche, dans sa version contemporaine, substitue le débat d’arguments par l’étiquette injurieuse. Le langage devient tribunal ; l’adversaire, un ennemi absolu. Ainsi, le champ politique se rétrécit, et la raison est piégée.

Quant à la bataille médiatique internationale — dans laquelle Israël, pour reprendre l’exemple le plus frappant, a souvent perdu du terrain — elle est la métaphore de cette défaite : les images fabriquées, les récits arrangés, l’emportent sur les faits. Face aux atrocités, les mots se retournent en culpabilisation morale. L’éthique, l’esprit de responsabilité, la raison, disparaissent des écrans.

Nous perdons la guerre des mots, et cela affaiblit notre posture dans la guerre du réel.

La taxation, l’économie et la démagogie : le piège fiscal

Venons-en à cet autre symptôme de défaite de la raison : la présentation dans la classe politique en France et dans nos médias du « débat » sur l’impôt. Au nom de la justice sociale, on propose une taxe Zucman sur les grandes fortunes — une hérésie économique dans une France déjà étranglée par l’impôt. Le problème est le poids des dépenses publiques, alors on augmente les impôts… où est la raison ?

On confond stocks et flux, patrimoine et revenu : on taxe ce qui ne génère pas de liquidité, on étrangle l’investissement, on répand l’idée fausse que les riches ne paient pas leur part. On commet la même erreur qu’avec l’ISF ou l’IFI. On sait bien que c’est une grossière erreur mais on camoufle cela en stigmatisant les riches et les entreprises, en pointant du doigt, en désignant l’ennemi.

Cette erreur dépasse largement nos frontières. Nous comparons le montant de notre Dette au PIB, un stock face à un flux, quand nous devrions le comparer à la richesse nationale, un stock face à un stock, et mettre face au PIB la charge de la dette, un flux face à un flux.

Mais au fond, ce tour de passe-passe dans nos discussions budgétaires n’est qu’un écran de fumée — une diversion idéologique pour masquer l’abdication sur la dépense publique et la réforme structurelle indispensable. Au lieu de réduire les coûts de l’État, on pressurise davantage les acteurs économiques.

Ceci est un symptôme de la victoire de la démagogie : on flatte la colère sociale, on promet tout, on délivre peu, on change les mots mais pas les mécanismes. Au final, on aggrave nos problèmes, on fait taire la raison, on fait fuir les porteurs de solutions.

Vers une revanche : espérance et résilience de la raison

La défaite que je décris n’est pas encore absolue. Nous sommes en retard dans la bataille médiatique, nous l’avons peut-être même perdue, mais le réel finit toujours par reprendre ses droits.

Les peuples ne sont pas des foules manipulées indéfiniment. Sous le vernis de la narrativité, l’histoire parle : les sociétés voient, comparent, jugent. Quand la violence terroriste fouette une nation, on ne peut la camoufler éternellement par des postures symboliques.

La revanche de la raison viendra par l’éducation, par la transmission, par la permanence de ceux qui refusent l’idéologie et les dogmes, par le réveil de la conscience collective.

En France cela passe par la défense de la Laïcité, partout. Nous allons fêter les 120 ans de la Loi dite du 9 décembre 1905. Il faut que partout en France nous restaurions l’esprit de cette belle loi.

Soyons tous des ambassadeurs de la Laïcité, c’est-à-dire de l’acceptation de l’Autre parce que Autre, du droit de croire comme de ne pas croire, du droit de pouvoir pratiquer une religion comme d’en changer ou de ne pas en avoir, de la séparation entre l’Etat et les dogmes, de toute nature. C’est la meilleure façon d’éveiller le Peuple, de réveiller les consciences

La nuit de la défaite dans les médias peut aussi précéder l’aurore d’une victoire du Peuple — une victoire de la Force, de la Sagesse, de la raison, la défaite des obscurantismes, la victoire de la Fraternité, de la Liberté, de l’Égalité, de la Laïcité…

Regardons à l’horizon, la Lumière revient…

Patrick Pilcer, Président de Pilcer & Associés, conseil et expert sur les marchés financiers, auteur de « Ici et maintenant – lecture républicaine de la Torah » (préface du Grand Rabbin de France, Haïm Korsia, éd. David Reinharc).

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