L’avènement du parlant en 1927 ouvre de nouvelles voies au cinéma. Désormais les dialogues remplacent avantageusement les carton-titres et la musique de la bande sonore souligne le récit. Hollywood privilégiera les pièces de théâtre, le Music-Hall, les comédies musicales.
Ces productions répondent aux attentes d’une société meurtrie par les conséquences du krach boursier de Wall Street en 1929. Les années 30 sont noires pour l’Amérique. Chômage, grèves, sécheresses et tempêtes de poussière, misère conduisent une importante population à migrer vers l’Ouest. Le New deal de Roosevelt avec le National Industrial Recovery Act en 1933, puis la WPA (Works Project Administration) en 1937 n’empêcheront pas une nouvelle rechute de la bourse.
Dans ce contexte, de nombreuses sociétés de production indépendantes sont acculées à la faillite. Le marché est désormais dans les mains de huit grandes compagnies sous la surveillance des investisseurs, les banques. 500 films seront produits dans les années 30, soit la moitié de la décennie précédente.
Laissons de côté les comédies musicales, pour un nouveau genre : la comédie légère, dont Ernst Lubitsch fut le précurseur. Son nom vient à l’esprit dès que le sujet est abordé. Maître incontesté des opérettes filmées, Lubitsch s’inspire du théâtre de boulevard français et se spécialise dans les comédies.
Elles connaissent un franc succès malgré certaines lourdeurs de la mise en scène et parfois une vulgarité des propos. A titre d’exemple, dans “Sérénade à Trois”, le jeu de mots « Elle monte bien à cheval » en VOST peut se comprendre en VO par l’allusion sexuelle « Elle chevauche bien ».
Dans ce film, le ménage à trois est ici inversé. C’est la femme et non l’homme, qui ne peut choisir. Pour ses confrères Lubitsch fait des films à femmes et trop commerciaux. Il utilise en effet toutes les grosses ficelles du vaudeville : le quiproquo, les situations cocasses, les propos à double sens, auxquels il ajoute son humour juif. L’immoralité est omniprésente dans toutes ses comédies, qui pourtant ne seront pas censurées par le code Hays.
Ses grandes réussites : ‘La Huitième Femme de Barbe Bleue’ 1938 (Cary Grant, Colette Colbert) – ‘Ninotchka’ 1939 (film anti-rouges avec Greta Garbo) et les magnifiques ‘Jeux Dangereux’ 1942 (l’infidélité à Vienne occupée par les nazis) – ‘La Folle Ingénue’ 1946 (une satire de l’aristocratie avec Charles Boyer). Tous ces films sont de petits joyaux à voir ou à revoir.
Lubitsch a mis la comédie sophistiquée à la mode. Il sera suivi par Frank Capra, Howard Hawks, George Cukor et quelques autres réalisateurs de talent. Capra signe trois grandes réussites : ‘New York – Miami’ 1934 (comédie romantique avec Clark Gable) – ‘L’extravagant Monsieur Deeds’ (un riche héritier décide de distribuer aux pauvres sa récente fortune, avec Gary Cooper, Jean Arthur) – ‘Vous Ne L’emporterez Pas Avec Vous’ 1938 (la mésentente de deux familles, l’une aisée, l’autre modeste, sur l’union de leurs enfants dans le contexte d’un différend à propos d’un terrain, avec J. Arthur, James Stewart). – ‘Uniformes et Jupon Court’ 1942 de Billy Wilder (dans un train une femme déguisée en fillette trouble un officier de l’armée)
Ni Hawks, ni Cukor ne sont des spécialistes du genre. Hawks réalise en 1938 ‘L’impossible Monsieur Bébé’ (une histoire loufoque avec Katherine Hepburn et Cary Grant. Une magnifique comédie.)
Après-guerre, le public se lasse de ces innombrables comédies superficielles de série B produites par Hollywood. La mode a changé et le genre ne fait plus recette. Il faut néanmoins citer : “Arsenic et Vieilles Dentelle”, de Capra, 1941 mais sorti en 1944, (deux sympathiques vieilles folles empoisonnent des messieurs âgés. Un neveu, Cary Grant, découvre leur secret). –”Madame porte la Culotte” de Cukor, 1949 avec les inséparables Spencer Tracy et Katherine Hepburn, en couple dans la vie, et le très tardif “Un, Deux, Trois” de Billy Wilder 1961 (le directeur de Coca-Cola à Berlin doit surveiller la fille délurée de son patron américain. Elle s’éprend d’Otto, un allemand communiste de Berlin-Est. Rires assurés).
Selon nos éminents médecins, le rire est indispensable pour nous maintenir en bonne santé. Profitons de ces films joyeux, qui nous mettent de bonne humeur et qui nous font rire. Rien de vaut plus qu’une bonne comédie pour retrouver le moral après un discours de Macron.
Note : On peut se procurer à bas prix, entre 2,40 et 4,50 €, de nombreux DVD et BLU-RAY neufs sur quelques sites discount.
Léon Terjanian