L’arme des sanctions et ses conséquences

Des sanctions, des sanctions …et après ?

Les Etats-Unis ont mis en place le régime de sanctions le plus draconien pour punir la Russie d’avoir envahi l’Ukraine.

Première série de sanctions 

Elles ont commencé par le gel des comptes en dollars des oligarques russes. 

Deuxième série de sanctions 

Elle atteint un cran supérieur : le gel des comptes en dollars de la banque centrale de Russie. Cette dernière mesure n’avait d’abord été pratiquée qu’à l’encontre de pays dits voyous, comme l’Iran, la Corée du Nord, la Syrie.

D’un jour à l’autre, la Russie a été exclue du système de paiement Swift, système qui permet à tous les organismes financiers du monde entier de se relier et de transmettre des données, des informations, et des virements sécurisés. 

Des vagues successives de sanctions ont été appliquées, par les Etats Unis et par l’Europe, et ont porté sur des interdictions de produits russes, de gaz, de pétrole, de charbon, de matières premières (engrais, matières agricoles,…).

Les grandes entreprises occidentales, américaines et européennes, ont été amenées à cesser toutes relations et toutes activités avec la Russie. Cette rupture s’est traduite par des pertes comptables de plusieurs dizaines de milliards de dollars et d’euros. 

Le reste du monde

Contre toute attente, une grande partie du reste du monde a refusé de se plier aux sanctions financières et extra- financières dictées par les Etats-Unis et par l’Union Européenne.

Lors d’un vote à l’ONU sur les sanctions applicables à la Russie, la majorité des états ont refusé l’application des sanctions dictées par les Etats-Unis

Parmi ces pays on retrouve la Chine, mais aussi l’Inde, les pays du Golfe, le Brésil, les pays africains, l’Indonésie…

Les 3/ 4 de l’humanité ont signifié leur refus de suivre aveuglément les diktats de l’Europe et des Etats-Unis.

Les Etats-Unis ne peuvent plus compter que sur l’Europe, la Grande Bretagne, le Canada, le Japon, et l’Australie pour appliquer ces sanctions.

La Turquie, bien qu’étant membre de l’OTAN, a même considérablement développé ses exportations vers la Russie.

Le boomerang des sanctions.

Plusieurs conséquences, dont certaines étaient totalement imprévues, se dégagent déjà à l’heure actuelle.

– Les pays qui refusent les sanctions ont développé leur commerce entre eux, hors de la zone dollars, en payant leurs échanges de marchandises soit dans leurs monnaies nationales, soit en yuan, soit en roubles. La dédollarisation est en marche.

– Le refus de s’approvisionner en énergie fossile russe renchérit considérablement  le prix de l’énergie en Europe, et rend l’Europe totalement dépendante du bon vouloir de ses fournisseurs : l’Arabie Saoudite, le Qatar, et les Etats-Unis.

– Le fait de geler les comptes, les immeubles, les investissements russes en Europe et aux Etats-Unis amène de nombreux pays riches à ne plus vouloir investir en Europe et aux Etats-Unis.

Dernier rebondissement en date :

Le refus de l’Arabie Saoudite et du Qatar de réinjecter quelques milliards de dollars dans le capital du Crédit Suisse*, s’explique  en partie par le fait que les émirats et les pays du Golfe ne voient aucun intérêt de financer des groupes financiers qui peuvent se permettre de bloquer leurs comptes à tout moment.

Limites et efficacité des sanctions

Les sanctions ont causé d’immenses dommages aux économies occidentales, notamment européennes. La fin de l’approvisionnement en gaz, la coupure des gazoducs Nord Stream 1 et 2, ont définitivement altéré les relations entre l’Europe et la Russie.

Au profit de qui ? Des Etats Unis?

Mais ces sanctions ont- elles au moins été efficaces ? A priori, Non. L’économie russe se porte bien, le système Swift a été remplacé par un système équivalent russe et chinois, reliant plus de 400 établissements financiers dans le monde.

Le monde se dédollarise de plus en plus, ce qui à terme se traduira par un  renchérissement considérable des emprunts émis par les Etats Unis et par le monde occidental.

Le commerce mondial se porte-t- il mieux?

On constate de plus en plus que le monde se fracture en 2 blocs: d’une part, les Etats-Unis et ses vassaux, d’autre part, 

les BRICS,  (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) et le reste du monde.

Et maintenant ?

Les Etats-Unis envisageraient d’étendre très prochainement le système de sanctions à la Chine, afin de la dissuader d’aider la Russie, et de lui faire comprendre de ne pas trop s’intéresser à Taïwan. 

Mais la Chine a le temps pour elle. Elle pense que Taïwan reviendra à la Chine, tôt ou tard. Et l’application de sanctions, draconiennes ou non, ne pourra se traduire que par un renforcement de ses capacités industrielles et technologiques à terme.

La Chine a certes encore beaucoup de points faibles, mais sa stratégie de sécurisation  de ses matières premières et sa stratégie d’ouverture au monde via la  » route de la soie », lui permettront un vaste échange commercial  avec les autres pays  par voie maritime ou par voie terrestre.

L’escalade des sanctions n’a rien résolu. Ces sanctions  économiques et financières deviennent de plus en plus dangereuses, tant pour les pays qui les décident que pour les pays concernés.

Chanoine

* Actionnaires historiques du Crédit Suisse: Arabie Saoudite 9,9 %, Qatar 6,8%

Partager cet article :

Facebook
Twitter
LinkedIn