Guignol.e.s.

Quel que soit le sujet abordé dans l’hémicycle du Palais Bourbon, le pugilat y a remplacé le débat. La discussion et la confrontation des idées ont cédé la place à l’invective, le grossier, le gluant. Le théâtre de Guignol version trash.

L’Assemblée Nationale n’est plus qu’une arène dont les rangs sont garnis de primates grimaçants et ricanants, qui espèrent que leurs vociférations masqueront leurs lacunes et leurs insuffisances. La plupart du temps, ce qui fait office de discussion n’est qu’un embrouillamini de propositions indigentes du côté parlementaire et de coups de force du côté ministériel.

Si l’on peut déplorer l’affaissement du pouvoir législatif, on ne peut s’en étonner. Il est le pendant, le complément indispensable du macronisme.

La célérité du Blitzkrieg de l’élection d’Emmanuel Macron explique, en partie, la médiocrité des nouveaux députés. Dans l’enthousiasme, somme toute légitime, de l’élection présidentielle, le vent de l’insouciance a soufflé, mais la force de ce souffle a été décuplée par l’amnésie propre aux peuples occidentaux, l’absence de repères historiques et, en un mot, le “j’m’en foutisme” général. 

En partie seulement, car on ne peut pas dire pour autant que cette élection, blitzkrieg ou pas, n’était pas prévisible, car Macron est le fils naturel de Sarkozy et de Hollande, qui sont d’accords sur le fond, opposés pour la galerie et unis dans l’obsession du « Nouvel Ordre ». Ce sont les deux faces et la tranche de la même pièce.

Le Sarkhollandomacronisme n’est que l’aboutissement d’un processus antérieur visant à imposer le socialisme mondialisé sous la panoplie du libéralisme, sauf que le libéralisme est censé incarner la liberté et que la mise en œuvre du socialisme est incompatible avec cette notion. La notion honnie de « liberté des peuples à disposer d’eux-mêmes ».

Chassé par la porte, le néo-socialisme libéral est revenu par la fenêtre (n’oublions pas que la plupart des ministres sont d’anciens membres du PS, dont pas mal de « strauss-kahnien »). Défense de ricaner.

Le socialo-libéralisme goût caviar et son universalisme à paillettes, qui accouche de théories fumeuses qui ne sont applicables qu’aux autres, n’a que faire du Peuple et de ceux qui le représentent. Un Parlement inefficace est le plus utile qui soit pour la mise en œuvre du plan.

L’Histoire a montré que la pérennité du socialisme repose sur la limitation maximale des libertés individuelles et l’immixtion subtile de l’Etat jusqu’au plus profond de la sphère intime, réalisée par (entre autres) l’édiction exponentielle de normes toujours plus précises et intrusives, ponctuées d’injonctions infantilisantes (ne fumez pas, ne buvez pas, etc…). Le fiasco du confinement en aura été un exemple éloquent.

Le Peuple doit admettre, une fois pour toutes et quoi qu’il en coûte, que l’État sait mieux que les citoyens ce qui est bon pour eux, qu’il ne peut y avoir qu’un seul détenteur du Savoir : l’État à travers celui qui le représente : Jupiter.

L’action gouvernementale étant d’essence quasi-divine, il n’est donc pas nécessaire que les députés soient en capacité de contrarier les décisions de l’Exécutif, bien au contraire, la vacuité intellectuelle et le manque de scrupules étant désormais des atouts considérables pour siéger dans l’hémicycle. 

Pour arriver à ses fins, le Pouvoir a besoin d’une Assemblée soumise et passive ou, à défaut, d’une opposition discréditée, ce que celle-ci parvient à faire avec une efficacité rare. L’image que donne l’Assemblée Nationale conduit le citoyen-électeur à s’en détourner chaque jour davantage et ne laisse pas augurer grand-chose de bon pour les élections à venir.

A propos de la grève du 7 mars, on a entendu dans la bouche d’Olivier Véran, porte-parole du Gouvernement, qu’une «France à l’arrêt» reviendrait à «négliger la santé de nos enfants» ou à «prendre le risque d’une catastrophe écologique, agricole ou sanitaire». Finalement, à l’exagération ne peut répondre que l’outrance.

Au cours de l’Histoire de la République, les parlementaires n’ont pas tous brillé par leur éloquence, leur dignité ou leur loyauté, mais ils ne constituaient qu’une minorité de derniers de la classe.

Aujourd’hui et pour longtemps, les derniers sont devenus les premiers, la méritocratie ayant cédé les pas à la médiocratie (Alain Deneault), celle-ci étant sur le point de devenir une force politique en soi. Quoi qu’on en pense, les adolescents immatures qui nous représentent sont la photographie de ce qu’est notre société, ce que nous sommes.

« Occupe-toi de Moi, je m’occuperai de Toi » a dit Jésus à Catherine de Sienne. Occupons-nous de la démocratie et la démocratie s’occupera (bien) de nous.

O.T.

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