‘’Abies pectina’’ en latin, je suis le sapin blanc des Vosges. L’arbre par excellence du massif vosgien avec ses compagnons qui sont : épicéas, douglas, normands, pins sylvestres aux aiguilles persistantes et leur cousin, le mélèze qui perd lui ses aiguilles en hiver.
Les forêts de résineux, par leurs allures, leurs couleurs et leurs odeurs sont une ode d’une grande vivifiante pour les humains, pour le gibier et pour les abeilles qui cohabitent dans ce massif.
Le sapin blanc est aussi l’image de l’éternité qui fait rêver les alsaciens et les vosgiens, bercés par les légendes et les contes où le sapin des Vosges est le héros de notre imaginaire depuis la nuit des temps.
Bien sûr, la magie du père Noël a bercé ma jeune enfance. Le sapin où l’épicéa, l’arbre de Noël étaient le lieu où le père Noël déposait les cadeaux, car nous n’avions pas de cheminée dans l’appartement de mes parents.
Vers mes 6 ans, ma déception fut grande d’apprendre par un copain d’école que le père Noël n’était qu’une légende. Je me souviens de la réponse de ma mère : « Fils, ta petite enfance d’insouciance est terminée. Tu viens d’ouvrir la porte de la réalité, bienvenue ».
La réalité
Le sapin noir n’existe pas, c’est un peu la petite robe noire BCBG. Il ne faut pas confondre le sapin blanc et le pin noir (Pinus-Nigra) d’Europe méridionale. Le roi des sapins de Noël depuis une décennie en Europe est le Nordmann (Pinacée-Caucase). Le nordmann nous vient du Caucase et d’Anatolie. Il aime les montagnes sèches et chaudes. Le Nordmann est un envahisseur, peut-être le nouveau roi de nos massifs vosgiens dans quelques décennies. Nos épicéas et nos sapins blancs subissent de violentes attaques de scolytes et de coléoptères et surtout ils manquent d’eau. Ils sont dans une situation critique.
Vous pouvez le constater en regardant les versants de nos Vosges en ce moment. Les feuillus n’ayant plus de feuilles font apparaître plus facilement le désastre et l’agonie rougeoyante des sapins et d’épicéas assoiffés.
Le contraste entre ces tâches rouges sur un tapis vert est impressionnant. Le phénomène s’accélère d’une façon immuable, et nous restons impuissants devant le spectacle du changement climatique qui détruit sous nos yeux.
Le père Noël lui-même est désarmé, sa magie n’a aucun pouvoir sur les sapins et les épicéas symboles de cette période.
Alors quels choix faire : sapins blancs, épicéas, nordmanns qui restent verts, ou se laisser gagner par la mode du sapin noir ? La tendance aux USA, est un sapin synthétique, une mélodie aux arguments de nos écologistes, protection de la forêt, pas de coupes, pas d’aiguilles aux sols, réutilisables à chaque noël, sans oublier l’argument massue : c’est tendance !
L’origine de cette tradition
L’épicéa est la représentation pour les cultures celtiques de la renaissance du soleil (solstice d’hiver) et l’appel de l’enfantement. On ne touche jamais au gui réputé magique et sacré car le 23 décembre, le jour du solstice d’hiver, était pour les celtes le jour de la pierre. Le jour où l’on cueillait rituellement le gui avec une faucille d’or.
On raconte aussi qu’en cette période, on confectionnait des couronnes de paille pour entourer les pommiers afin de les protéger des gelées en allumant des feux pour assurer les futures récoltes.
C’est bien une tradition païenne, reprise par la chrétienté au moyen âge. A travers les siècles cette tradition a failli disparaître, à l’exception de la vallée du Rhin supérieur. Une autre tradition venant de ces temps anciens, a été propagée par les maîtres compagnons charpentiers. Il fallait mettre un sapin sur le haut de la charpente, à la toiture d’une maison avant d’être couvert, c’était un symbole qui attirait la grâce et la protection sur les habitants de la future demeure.
On raconte aussi que Sélestat est le berceau de la tradition de l’arbre de Noël. Mais cette thèse est contestée par l’Œuvre de Notre Dame en 1492 : « Item, acheté 9 sapins destinés aux 9 paroisses pour la nouvelle année, soit 2 sous de denier. (Item kaufft – IX tannendie IX kirchspill das gut jordarjnn zu empfolzen und datumb geben), preuve incontestable que la naissance de la tradition du sapin de Noël, n’est pas née à Sélestat mais à l’ombre de la cathédrale de Strasbourg selon les recherches de Mr. Georges Bischoff.
Le barde du Torchis