Les nouveaux misérables (suite)

Elle se déshabilla, elle se rhabilla…

Chapitre XXII

Il l’attira vers lui subtilement. Elle ne savait pas comment se comporter. Elle était gauche, maladroite, agitée, elle se déshabilla, se rhabilla, se déshabilla, se rhabilla, encore, plusieurs fois, ne sachant que faire d’elle-même dans ce lieu où la confusion des sentiments allait prendre une place prédominante. 

Rester ou se sauver ? Elle ne choisit ni l’un ni l’autre. Elle se laissa aller sans réfléchir dans le monde de Grabat si différent du sien, où elle savait qu’elle ne serait pas à la place privilégiée que le Grand Architecte lui avait dédiée. Il avait du mal à voir dans la pénombre de la chambre. La lumière du soleil s’infiltrait à travers les volets bleus, la beauté de l’île, le décor des lieux qu’elle avait voulu semblable aux années 50, étaient propices à cet amour inventé ou ressenti.

Ovate s’était déjà envolée. Ses divagations l’avaient emportée dans la peau de tous les personnages des contes et des amours impossibles. En changeant de personnage, elle pouvait se laisser faire sans avoir peur.   

Grabat se montra délicieusement tendre, aimant, affectueux, délicat, il était une mélodie d’une douceur infinie, un élixir d’amour. Il lui chuchotait qu’il était très amoureux, qu’il avait rêvé de ces instants, qu’il était comblé. Elle lui offrit enfin ce baiser Hollywoodien, un baiser, exquis, précieux, suave, le baiser de Scarlett O’hara, un baiser magique qu’elle avait tant imaginé qu’il était devenu le symbole de ces 72 heures. Grabat lui chuchotait encore :

«Ton baiser est une source de vie, il ne me quittera plus. C’est le plus pur, le plus vrai des baisers d’amour que je connaisse. En t’embrassant je te respire, je traverse ton âme complètement. Totalement. »

Tous deux se découvraient et se laissaient aller. Ils ne ressentaient aucune gêne, aucun frein. Ils partageaient la fusion de l’amour de Grabat et des désirs d’Ovate. Entre les deux amants tout coulait de source, ils partageaient une complicité spontanée et profonde qui l’étonnait et qui le ravissait. Tout était consenti et désiré. Elle lui rendait ses caresses sa tendresse et ses gestes avec candeur. Ils passèrent ces 72 heures collés l’un à l’autre, enfermés dans la pénombre de la chambre où les rayons du soleil s’éteignaient avec pudeur pour ne pas les déranger.

Elle voyait le visage de Grabat se détendre, il paraissait plus doux plus apaisé. Elle le berçait de mots bleus, elle lui chuchotait des mots, des phrases et des couplets. Il confiait à Ovate que ses paroles, ses gestes, son amour, étaient une première fois dans  sa vie, et il soufflait encore et encore tout son bonheur sur le bord de l’oreille d’Ovate : 

« Comment deux êtres peuvent en moins d’une heure savoir et sentir qu’ils sont l’un à l’autre et que leurs âmes sont soudées comme le Ying et le Yang, le rapport que nous avons nous deux, est extrêmement rare. Nos peaux disparaissent, l’osmose est profonde. Si d’autres y arrivent après des années, ce doit être très rare. Je pense que 95% des humains n’en ont aucune idée ». 

Au cours de ces 72 heures, elle observait cet homme se nourrir d’amour, comme pour faire un stock de sentiments qu’il emporterait avec lui pour mieux vivre, pour mieux guérir. Elle avait du mal à croire à  son  « amour ».  Son attitude ambigüe de ces longs mois d’échanges lui laissait entendre que Grabat voulait vivre son fantasme, un dernier amour, se prouver qu’il pouvait encore émouvoir une femme et qu’elle pourrait l’aimer.

Ovate donnait le change en attendant la fin de l’histoire qui selon elle, serait inéluctable. Cet homme qu’elle découvrait était trop faible pour aller au-delà de ses rêves. Il avait déjà réalisé l’exploit de traverser airs et mers, il avait atteint ses limites.

Ovate

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