7 janvier 2015 : Charlie Hebdo assassiné
7 janvier 2022 : la peur n’a pas changé de camp

7 janvier 2015 : il y a sept ans, un commando islamiste assassinait la rédaction de Charlie Hebdo, se sentant investi du devoir d’infliger une punition divine à ceux qui avaient osé publier une caricature de leur prophète. Le surlendemain fut perpétré un autre crime islamiste, cette fois contre une supérette juive, l’Hyper Cacher de la porte de Vincennes, à Paris. Haine de la France, haine de la liberté, haine des Juifs, des « croisés », des mécréants, des autres…

Avant, il y avait eu Mohamed Merah, capable de tirer une balle dans la tête d’enfants, à bout portant (et encore avant, le 11 septembre, coup d’envoi du nouveau djihadisme). Après, il y eut les massacres du 13 novembre à Paris, avec notamment 130 morts au Bataclan, puis celui du 14 juillet 2016 à Nice (86 morts), puis la décapitation de Samuel Paty, le 16 octobre 2020… La liste n’est hélas pas exhaustive.

À chaque fois, le chef de l’État, hier François Hollande, aujourd’hui Emmanuel Macron, nous servit un magnifique discours et une promesse de fermeté : cette fois, ce sera l’hydre islamiste qui sera décapitée ! Résultat, jamais l’influence des Frères musulmans, matrice de l’islam politique, n’a été aussi grande dans nos banlieues, jamais les territoires perdus de la République (renommés « quartiers de reconquête républicaine », mais que peut-on reconquérir avec des discours et des incantations ?) n’ont été aussi étendus.

Évidemment, il serait injuste de prétendre que rien n’a été fait. On expulse quelques pseudo-imams haineux çà et là, on ferme deux ou trois mosquées ou sites internet… Mais il demeure un déni majeur : l’islamisme s’évertue à séparer les musulmans du reste de la communauté nationale dans un dessein de conquête. Il utilise à cet effet tantôt la violence, tantôt l’infiltration (la « taqîya »). Il réussit à convaincre un nombre croissant de Français musulmans qu’ils ne sont que musulmans et pas Français parce qu’ils seraient détestés par leurs compatriotes. Il œuvre méthodiquement à susciter, nourrir et accroître tous les racismes : celui des musulmans à l’égard des autres, celui des autres à l’égard des musulmans. Le déni est dans le refus d’admettre la vraie mesure de la gravité de la situation. Il s’agit d’une vraie guerre, pour le moment plus idéologique qu’armée, malgré les attentats.

N’oublions jamais les photos de Téhéran, Istanbul ou du Caire prises dans les années 1960, ou les propos du président égyptien Nasser dans les années 1950, lors d’une conférence de presse, au sujet du voile des femmes. Le monde arabe était alors sur la voie de la sécularisation. C’était avant que les Frères musulmans ne tissent leur toile, comme il tente de le faire aujourd’hui en Europe, et tout particulièrement en France. Aujourd’hui précisément, dans de nombreuses villes du monde arabo-musulman, de Ramallah à Dubaï en passant par Tunis et Casablanca, et jusqu’à Téhéran, les jeunes veulent s’affranchir de l’obscurantisme islamique, là où à Trappes ou à Vénissieux, ils sont de plus en plus nombreux à vouloir s’y abandonner, et pire, à l’imposer à tous. Et surtout à toutes ! 

Même à Kaboul, les femmes manifestent contre la folie talibane. Dar al-Islam et Dar al-Harb, terre d’islam et terre de guerre, comme le décrit l’islamologue Gilles Kepel. Guerre de conquête idéologique, disions-nous. Elle est une étape, et selon différentes enquêtes, elle a déjà pour victimes la majorité des jeunes musulmans de France, adeptes de charia. Pour l’extrême gauche et les indigénistes, l’islamisme se résume au terrorisme. Le reste, c’est du multiculturalisme (ou de la créolisation) qui enrichit la société. Ne sont-ils pas des complices de cette idéologie ?

Le refus ou l’incapacité d’Emmanuel Macron à prendre la véritable mesure du péril, et à en tirer toutes les conséquences, devrait être un immense caillou dans sa chaussure électorale, car les actes ne sont pas au niveau des discours, ni même des lois, comme celle 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République. Mais la pommade Covid fait son effet. La droite nationaliste cumule plus de 30 % des intentions de vote dans les sondages (et une grande partie des électeurs LR sont sur la même position sur ces sujets), mais le « pas de vague », cousin du « en même temps », l’emporte encore dans les esprits macroniens, et plus encore dans les petits fiefs que sont les académies de l’Éducation nationale, malgré le volontarisme initial, et largement envolé, du ministre Jean-Michel Blanquer quant à la sacralisation de la laïcité. Pas de vague, pas de vague, surtout pas de vague !

7 janvier 2015-7 janvier 2022. Il y a cinq ans, les frères Kouachi assassinaient Cabu, Charb, Honoré, Tignous et Wolinski, coupables de liberté d’expression. Furent également happés par les balles de ces ordures Elsa Cayat, Bernard Maris, Mustapha Ourrad, Frédéric Boisseau et le policier Franck Brinsolaro. Mort pour la liberté, au champ d’honneur. Mais ce fut surtout l’horreur. Eux étaient en guerre, combattants de la démocratie, de la liberté (et pas seulement d’expression), pour la laïcité. Sept ans plus tard, Emmanuel Macron a mobilisé son arsenal : la fameuse loi confortant le respect des principes de la République. Depuis, nous craignons fort que les islamistes ne tremblent guère et ne fassent que peu des cauchemars chaque nuit. Où en serons-nous dans cinq ans, dans l’hypothèse d’une réélection d’Emmanuel Macron, s’il devait persister dans sa politique du « pas de vague » ?

7 janvier 2022 : les locaux de Charlie Hebdo sont une forteresse. Les combattants de la liberté vivent et travaillent retranchés. La peur n’a pas changé de camp.

Michel Taube (Opinion Internationale)

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