Elle les respire depuis son enfance. Les épices sont chez Mireille Oster une histoire de famille, un amour des odeurs, des saveurs, des couleurs, transmis par son grand-père. C’est Joseph qui, dès 1933, a fondé l’institution « Pain d’épices » en faisant chanter le marché de Noël de Strasbourg, place Broglie, sur des notes aromatiques : cannelle, gingembre, badiane, muscade, cardamome, la, la, la. En 1980, Constance, la maman de Mireille, sédentarise un coin du festival en ouvrant une première boutique 14, rue des Dentelles, dans le quartier de la Petite-France. Trois fours y tournent toujours à plein régime.
Mireille poursuit la tradition, l’enrichit de sa forte et attachante personnalité, la développe jusqu’à devenir une reine de la spécialité, localement et ailleurs. Avec la CCI (*), elle exporte l‘Alsace et le savoir-faire familial dans des villes qui font voyager dans la tête : Shangaï, Séoul, Hanoï, Tokyo, Florence… En 2018, elle s’offre un rêve en ouvrant une seconde boutique dans un ancien moulin à épices (Würtzmühle), 17, rue des Moulins. Un lieu de cœur et de symbole, vieux d’un demi-siècle, qu’elle espérait depuis longtemps.
Posément, tendrement, Mireille Oster vous déroule une liste d’épices, sans doute ses préférées. Toutes d’origine végétale, elles ont « une âme », dit la marraine du Torchis, et surtout des vertus salutaires : « Est-ce que vous imaginez que ce petit morceau de cannelle aide à fluidifier le sang ? ». L’anis vert exorcise le corps des flatulences. Le poivre calme la colère, la cardamome coupe la faim, le gingembre fortifie la vigueur masculine. Le clou de girofle, antiseptique et cicatrisant, s’impose chez les dentistes sous forme d’huile essentielle (eugénol). Le macis (ou fleur de muscade) rend hilare : c’est une épice qui met en joie… jusqu’à shooter si consommée à fortes doses.
Le pain aux 7 épices, produit phare de la maison Oster, contient toutes celles-ci. Si l’on y ajoute le miel, un antibactérien, anti-inflammatoire, anti-oxydant, sa composition ressemble à une ordonnance de santé. On comprend pourquoi les Allemands appellent le pain d’épices « Lebkuchen », pain de vie. Il serait même une gourmandise régimo-compatible : « On arrive rapidement à satiété, un cube de 3gr suffit pour avoir la sensation, le plaisir. Le pain d’épices vous parle longtemps en bouche, et il n’y a pas de manque comme avec le sucre qui fait toc-toc et crée une addiction.»
Ultime propriété, le pain d’épices est un produit longue conservation. « Par curiosité, on en a gardé pendant 10 ans, il était encore comestible », dit Mireille Oster. Placé dans une boîte métallique, à l’abri de l’air et de la chaleur, il se consomme au mieux de sa forme durant plusieurs mois. S’il devient sec, aucun souci : « Mettez-le sur un rebord de fenêtre un jour de pluie, il retrouvera tout son moelleux. » Et voilà pourquoi on le surnomme « pain baromètre ».
(*) Chambre de commerce et d’industrie.
Légende photo : Mireille Oster parle avec gourmandise de son pain d’épices, un classique du marché de Noël de Strasbourg. (Document remis)